AFRICINE .org
Le leader mondial (cinémas africains & diaspora)
Actuellement recensés
24 937 films, 2 562 textes
Ajoutez vos infos
La violence ! quelle fin ?
FESPACO 2011
critique
rédigé par Valentine Sanou
publié le 13/05/2011
Raoul Peck, réalisateur haïtien
Raoul Peck, réalisateur haïtien
Missa Hébié, réalisateur burkinabè
Missa Hébié, réalisateur burkinabè

Le monde est violent et le cinéma s'en fait le témoin. Dans quel contexte nait-elle ? Quelle fin vise-telle précisément dans Moloch tropical de Raoul PECK et En attendant le vote de Missa HEBIE ?
Pourquoi cette omniprésence de la violence dans les productions africaines ? Injures grotesques, bastonnades, fausse noyade, gaz lacrymogènes, électrochoc, fusillades, viol, immolation, etc. La violence est là dans Moloch tropical et En attendant le vote ! On se lance sans cesse des injures.

Dans Moloch tropical, le président en est une illustration parfaite. Il n'hésite pas à traiter son épouse de pute et à faire subir le supplice du pneu au journaliste, son meilleur ami. Gaz lacrymogènes et fusillades marquent En attendant le vote.
Bastonnades et électrochocs des opposants actifs ou éventuels suspects, fusillades sur des foules en révolte. Ainsi s'exprime la violence à travers ces deux films.
De Moloch tropical à En attendant le vote, ces violences naissent de la revendication du droit à la liberté, à l'égalité et une meilleure condition de vie. La population est assoiffée de démocratie et dégoutée de la misère, de l'injustice et du pillage des biens publics. Ce qui mène à des discours dénonciateurs ou des contestations publiques. Face à cela, les dirigeants ne savent que faire le choix de la violence : répression et assassinats sont le lot commun des populations. La violence est le choix ultime de régimes incapables de négocier autrement l'exercice du pouvoir.

La violence est omniprésente dans les productions cinématographiques africaines, mais n'est-ce pas la situation actuelle
du continent ? Le cinéma cherche à la dénoncer pour mieux déconstruire les tares de notre société. Il appelle ainsi au changement. Il y a les films qui pensent y arriver en créant un
effet de choc, mais ils ne tombent pas pour autant dans le spectacle de la violence. Dans En attendant le vote, Missa HEBIE met en scène des soldats qui émasculent systématiquement leurs victimes, mais ne
nous le montre jamais directement.

Déconstruire la violence revient à en faire sentir les conséquences humaines. Pour cela, une distance est nécessaire.
Dans Moloch tropical, Raoul PECK procède par hyperbole pour ménager ce recul face à la violence. La rapidité des mouvements
de caméra et le rythme serré du montage sont souvent les moyens
d'emmener le spectateur dans l'action, mais c'est moins le cas de ces deux films. Ils privilégient la géographie des décors qui symbolisent les arcanes du pouvoir et mettent l'accent sur les rapports entre les êtres. Le spectateur est emporté dans l'effroi, la compassion et même souvent la révolte ! En restant sur ce terrain humain, ils veulent, bien davantage que ne le serait un spectacle voyeuriste, être au service de la paix.

Valentine SANOU
Burkina Faso

Version de l'article paru sur papier le Vendredi 04 mars 2011, Bulletin Africiné n°16 - Ouagadougou (Burkina Faso), FESPACO 2011 - n°5, p. 8.
Ce bulletin est publié par la Fédération Africaine de la Critique
Cinématographique (FACC) avec cette année le soutien du FESPACO, du ministère français des Affaires étrangères et d'Africalia.
Il est rédigé par des membres de la FACC présents au Fespaco 2011, venant de 9 pays d'Afrique.

Films liés
Artistes liés
Structures liées
événements liés