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Interview de Christophe Cupelin, réalisateur du film Capitaine Thomas Sankara
Sélection de la 65 édition du festival du film de Locarno
critique
rédigé par Tahar Houchi
publié le 18/09/2012
Christophe Cupelin, réalisateur du film Capitaine Thomas Sankara
Christophe Cupelin, réalisateur du film Capitaine Thomas Sankara
Tahar Houchi (Africiné)
Tahar Houchi (Africiné)
Thomas Sankara, à Harlem, USA / le 3 octobre 1984.
Thomas Sankara, à Harlem, USA / le 3 octobre 1984.
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Locarno 2012
Locarno 2012
Thomas Sankara, 1987.
Thomas Sankara, 1987.
Thomas Sankara & Blaise Compaoré
Thomas Sankara & Blaise Compaoré
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Capitaine Thomas Sankara de C. Cupelin
Première du film / Visions du réel (Nyon) / 22 avril 2012
Première du film / Visions du réel (Nyon) / 22 avril 2012

Tandis que la 65ème édition du festival du film de Locarno invite l'Afrique subsaharienne dans le cadre de son programme Open doors 2012, Christophe Cupelin présente son film "Capitaine Thomas Sankara" qui a remporté un franc succès public. Le film comme le titre l'indique est consacré au capitaine Thomas Sankara qui a dirigé la révolution burkinabèe et a été à la tête de l'État de 1983 à 1987, année de son assassinat.
Tantôt considéré comme Président des pauvres, tantôt comme porte-parole des laissés-pour-compte, il fut incontestablement un révolutionnaire non-conformiste dont la réputation a dépassé les frontières de son pays. Avec ce documentaire, le cinéaste suisse Christophe Cupelin, nous livre une chronique d'un assassinat annoncé et un portrait tendre de l'un des dirigeants les plus originaux, créatifs et importants que l'Afrique ait enfanté. Rencontre.

Il existe plusieurs films sur Thomas Sankara. Pourquoi un autre ?

D'une certaine manière, il n'y aura jamais assez de films sur Thomas Sankara, tant ce personnage a marqué l'histoire de son pays, du continent africain et dans une certaine mesure, du monde tout entier. Il représente une figure de chef d'État absolument sans équivalent dans l'histoire du 20ème siècle et cela promet certainement encore beaucoup d'autres œuvres à venir.



Le film est une sorte de balayage de son règne et de tous les changements positifs qu'il a imposés. Pourquoi un tel choix, alors que d'autres films s'intéressent à l'énigme de son assassinat ?

Je pense que le plus important et le plus intéressant, c'est de chercher à mieux connaître et à mieux comprendre la pensée et l'action de Thomas Sankara, plutôt que de se focaliser sur l'énigme de son assassinat. Personnellement, ce qui me frappe le plus dans la disparition de Thomas Sankara, c'est le fait qu'il n'ait pas réagi face aux menaces de mort répétées provenant de son entourage le plus proche. Thomas Sankara était conscient qu'il courait un grand danger et il a laissé faire. Pourquoi ? Comment ? Ce sont aussi des questions auxquelles le film essaie d'apporter des éléments de réponse, du moins de réflexion.

Le film est construit sous forme d'une chronique d'un assassinat annoncé. Vous avez aussi utilisé beaucoup les archives. Pourquoi ce choix ?

La particularité de mon film réside dans le fait qu'il est constitué à 95% d'archives. Il m'a semblé que c'était la forme la plus appropriée pour transmettre l'histoire du Capitaine Thomas Sankara et la manière la plus efficace d'en faire le portrait. Il s'agit plus de "ressentir" le personnage, plutôt que de "l'expliquer".

On vous sent subjugué par le personnage. Parfois, la distance s'efface. Est-ce que cela est voulu ?

Je crois que j'ai simplement essayé de faire le portrait de Thomas Sankara, en employant toute ma connaissance du personnage. Pour réaliser ce film, je me suis surtout laissé guider par mon vécu au Burkina durant la révolution, par la fréquentation durant vingt-cinq ans de diverses personnes qui ont connu Sankara de près ou de loin, et enfin par la lecture d'innombrables articles de presse, livres ou travaux universitaires.

A la fin, vous suggérez sans le soutenir l'implication de son ami Blaise Compaoré dans son assassinat. Silvestro Montanaro dans son film "Ombres africaines" évoque un plan de la CIA. Saura-t-on un jour la vérité ?

On connaît déjà une partie de la vérité… La vérité d'un fratricide entre deux frères de case où finalement, l'un succède à l'autre comme président. Ce que l'on n'a pas pu déterminer, c'est le niveau d'implication des responsabilités étrangères liées à l'assassinat de Sankara. La CIA ? La France ? La Côte d'Ivoire ? La Libye ? Des mercenaires libériens à la solde de Charles Taylor ? Et la liste n'est pas exhaustive.

Cela vous a pris combien de temps ?

Dans ma tête, j'ai commencé le film, il y a vingt-cinq ans… Plus concrètement, j'ai démarré le projet en 2007, à l'occasion de la commémoration internationale du 20ème anniversaire de la disparition de Thomas Sankara. Donc cinq ans, avec quelques périodes d'interruptions.

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

La principale difficulté rencontrée fut d'adapter le projet en fonction des aléas de la production. J'ai élaboré différents scénarios, mais le seul que j'ai finalement pu réaliser consiste en ce recueil d'archives.

Quel sera à votre avis l'accueil des festivals à ce film sachant qu'il suggère des choses dérangeantes ?

Pour l'instant, le film a reçu un très bon accueil des professionnels, du public et de la presse au festival Visions du Réel en avril dernier et au festival du film de Locarno ce mois d'août, tous deux en Suisse. J'attends seulement de voir si le film pourra passer au Burkina.

Retrouve-t-on aujourd'hui les traces de la pensée de Sankara au Burkina ?

Les traces de la pensée de Thomas Sankara sont nombreuses au Burkina et ailleurs dans le monde. "Tuez Sankara, il y aura des milliers de Sankara demain" prophétisait-il lui-même. Thomas Sankara était un visionnaire et c'est peut-être seulement maintenant que nous pouvons commencer à essayer de le comprendre. Parce qu'aujourd'hui, Thomas Sankara nous renvoie à notre propre actualité.

Propos recueillis à Locarno par Tahar HOUCHI.

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