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L'attentat
Inspiration algérienne en Orient
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 04/06/2013
Michel Amarger (Africiné)
Michel Amarger (Africiné)
Ziad Doueiri, le réalisateur.
Ziad Doueiri, le réalisateur.
Ali Suliman (Dr Amine Jaafari) et Reymonde Amsellem (sa femme, Siham Jaafari)
Ali Suliman (Dr Amine Jaafari) et Reymonde Amsellem (sa femme, Siham Jaafari)
Ali Suliman (Dr Amine Jaafari)
Ali Suliman (Dr Amine Jaafari)
Yasmina Khadra, écrivain
Yasmina Khadra, écrivain
L'attentat
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L'attentat
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L'attentat
L'attentat
Dr Amine Jaafari (Ali Suliman) et sa femme, Siham Jaafari (Reymonde Amsellem)
Dr Amine Jaafari (Ali Suliman) et sa femme, Siham Jaafari (Reymonde Amsellem)
L'attentat
L'attentat

LM Fiction de Ziad Doueiri, Liban / France / Etats Unis, 2012
Sortie France : 29 mai 2013

La violence qui marque la société israélienne est aussi révélatrice du "dialogue de sourds qui oppose l'Orient et l'Occident", selon le romancier algérien Yasmina Khadra. Ainsi L'attentat, écrit en 2005, s'inscrit dans une trilogie où figure Les sirènes de Bagdad, 2006, traitant des déséquilibres du monde oriental, accentués par les pressions internationales. Les tensions sont évoquées avec le style alerte qui a fait la réputation de ce militaire devenu écrivain. Depuis son départ de l'armée, en 2000, la notoriété de ses romans grandit et inspire des films. Morituri, 1997, est adapté par l'Algérien Okacha Touita en 2007, Ce que le jour doit à la nuit, 2008, motive Alexandre Arcady pour une production française. Les hirondelles de Kaboul, 2002, devient un film d'animation pour Zabou Breitman tandis que L'attentat, 2005, coproduction franco-américaine, est mis en scène par le Libanais Ziad Doueiri.



L'intrigue colle aux interrogations du docteur Amine Jaafari, réputé et bien intégré dans la société israélienne en dépit de ses origines arabes. Il s'active pour opérer les blessés d'un attentat, survenu dans un restaurant de Tel-Aviv, lorsqu'il apprend qu'on soupçonne sa femme qui y a péri, d'en être l'auteur. Menacé d'être inculpé pour complicité, déstabilisé par les révélations de la police, le docteur entreprend son enquête. En se rapprochant des territoires palestiniens où sa femme activait des liens, le rapport du chirurgien avec ses origines s'intensifie et fait remonter des malaises. Son regard change sur la personnalité de sa femme qu'il réévalue tout au long de film dans des flashs back.

La tension du récit, adapté avec Joëlle Touma, est savamment entretenue par Ziad Doueiri qui opte pour une mise en scène fluide, au diapason des élans des personnages. Le cinéaste libanais qui s'est forgé une solide expérience de technicien en travaillant sur des productions hollywoodiennes et des films américains indépendants, navigue entre Los Angeles et Beyrouth pour cultiver un cinéma efficace. Connu pour deux longs-métrages, West Beyrouth, 1998, et Lila dit ça, 2004, il assure aussi des épisodes de séries télé comme Sleeper Cell, 2005, en intéressant des producteurs américains. Et ce sont les dirigeants de Focus Features qui lui proposent le roman de Yasmina Khadra en vue d'une adaptation. "L'attentat a la qualité d'un grand thriller politique", estime le cinéaste.

Le réalisateur libanais brave alors les tabous de son pays, pour s'attaquer à un sujet situé dans un territoire israélien, avec des acteurs locaux. "Je ne suis le porte-étendard d'aucune lutte", assure pourtant Doueiri. Son héros qui défend l'existence de racines juives en chaque Arabe, et vice-versa, devant ses collègues qui l'honorent, s'impose aussi comme citoyen efficace en soignant les victimes des attentats. "Son métier est de sauver des vies, quelle que soit l'identité des gens", explique le réalisateur. "En remerciant les Israéliens de l'avoir soutenu, il est un exemple d'intégration. Tout ce qu'il va vivre ensuite lui fait perdre tous ses repères."

Au fil de l'enquête, Jaafar se heurte à la dureté de la société israélienne dans ses rapports avec les Palestiniens. "Mais le cœur du film est ailleurs, c'est l'explosion d'un couple", estime Doueiri. "Ce qui importe le plus dans le film, c'est ce qu'Amine apprend sur son couple, et sur lui-même." En tenant cette ligne, le réalisateur filme de près les émotions des protagonistes dont on découvre peu à peu la complexité. Leur histoire d'amour où coexistent deux points de vue, permet d'aborder avec plus d'impact les relations tendues d'Israël avec la Palestine. "Le conflit israélo-palestinien et la colère qu'il suscite sont connus de tous", explique Doueiri. "Je voulais m'éloigner de cette rhétorique de revendication. Dans son livre, Yasmina Khadra tient cette position, sans jamais céder au moindre slogan politique."

L'adaptation de L'attentat fait ainsi de Ziad Doueiri, le premier cinéaste libanais à avoir filmé en Israël. Grâce à son passeport américain, il a pu diriger des techniciens israéliens et palestiniens de l'intérieur, à Tel-Aviv, et une équipe européenne et palestinienne dans les territoires occupés. L'acteur israélien palestinien Ali Suleiman interprète avec retenue le docteur, et l'Israélienne Reymonde Amsellem fait revivre sa femme dans les flashs back. Le concours d'une production française, pilotée par Rachid Bouchareb et Jean Bréhat [3B Productions, ndlr], a relayé la défaillance des producteurs américains [de Focus Features. ils se sont retirés du film, ndlr]. Ziad Doueiri a pu ainsi donner corps au projet du livre, exprimé par Yasmina Khadra : "J'ai essayé d'aller au-delà de la crise et du mal, d'occuper un plateau où le tort et la raison se rejoignent pour dire l'étendue du malentendu… Expliquer, c'est bien ; sensibiliser c'est mieux."

Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France)

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