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Fièvres, de Hicham Ayouch
Traduire les hurlements haineux
critique
rédigé par Sunjata Koly
publié le 15/01/2015

Fièvres le nouveau film de Hicham Ayouch porte sur les relations difficiles d'un père en devenir et de son fils. Pour ce troisième long-métrage, le réalisateur franco-marocain abandonne le décor du royaume chérifien pour nous transporter dans l'univers claustral d'une cité française.

Adolescent turbulent de 13 ans, Benjamin décide de quitter le foyer pour aller vivre chez son père Karim qu'il ne connaît pas et qui est hébergé par ses parents. Immature, sans projet d'avenir, Karim va être violemment bouleversé par ses nouvelles responsabilités. L'intrusion brutale de Benjamin va transformer l'équilibre précaire de cette famille maghrébine taraudée par les drames intimes que sont l'exil et le handicap.



Hicham Ayouch réalise là une suite contemporaine aux 400 coups de Truffaut ou Le retour de l'enfant sauvage. Celui d'un petit fauve asocial, impertinent, provocateur qui a fait de son mal-être d'enfant métis (sa mère est Française) une arme affûtée de transgression. Le réalisateur franco-marocain nous dépeint un drame urbain au scalpel du street art où le sublime flirte avec l'éphémère. Les ténèbres sont striées d'éclats de lumière dans ce ghetto aux milles visages. Territoire de gouapes où un simple regard peut être source de bagarre. La rixe sous le pont nous rappelle le cinéma de Pasolini, avec ses cohortes de losers romantiques.

Vilain chaperon rouge en sweat-shirt à capuche, Benjamin trouve refuge auprès d'un paria, poète végétal aux accents céliniens. Dans le seul espace vert de ce film d'acier et de béton, le personnage de corniaud cynique incarné avec brio par Tony Harisson Mpoudja dit, tout haut, l'écœurement et la fureur que charrient en son for intérieur le garçon.

Slimane Dazi excelle dans la peau d'un adulte inachevé, confiné dans le carcan familial et l'univers étriqué d'une cité HLM. En guise de climax, Hicham Ayouch s'approprie le mythe d'Oedipe pour mieux détourner Freud. Faut-il tuer le frère du père pour que celui-ci finisse par exister ?
Porté par un jeu d'acteurs remarquables - Slimane Dazi et Didier Michon ont remporté le prix d'interprétation masculine au 13eme festival international du film de Marrakech - Fièvres est un long-métrage sincère qui nous rappellent que les hurlements haineux sont quelque fois des appels déchirants à l'amour.

Sunjata

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