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L'oeil du cyclone de Sékou TRAORÉ et Cellule 512 de Missa HÉBIÉ
La justice dans le collimateur du septième art burkinabé
critique
rédigé par Valentine Sanou
publié le 11/05/2015
Cellule 512 de Missa Hébié
Cellule 512 de Missa Hébié
Valentine Sanou (Africiné)
Valentine Sanou (Africiné)
Magazine en ligne Africiné, Le Leader Mondial (Cinémas africains & Diaspora)
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L'oeil du cyclone de Sékou TRAORÉ et Cellule 512 de Missa HÉBIÉ sont deux longs métrages burkinabés en compétition officielle au FESPACO 2015.

Hitler Mussolini, un nom combien évocateur, est le personnage qui tient les ficelles du récit de L'œil du cyclone. Il est joué par Fargass Assandé. Victime de violence sur ses parents à son jeune âge et enrôlé de force à l'armée à l'âge de 8 ans, il répond désormais à la triste appellation de rebelle. Un enfant soldat devenu plus tard un dangereux criminel. Dans les collimateurs de la justice, son avocate (jouée par Maïmouna Ndiaye) plonge dans les dessous de la politique. Elle compte sur ses découvertes et le statut d'enfant soldat afin d'obtenir une peine minimale pour son client, malgré les atrocités qu'il a commises sur la population. Malgré son inexpérience décriée et contre vents et marrées, cette brave dame décide d'aller jusqu'au bout, encouragée par un jeune avocat chargé du courrier à la cour. Elle est aidée par deux êtres contradictoires qui se résument en elle : son fort caractère et sa tendresse féminine.

Dans Cellule 512, une autre dame est mise en épreuve pour faire accoucher le droit à la justice. Le réalisateur ne lui donne pas une grande marge de manœuvre mais elle s'y essaye. Il s'agit de madame l'avocate chargée de défendre le dossier de crime accidentel de madame Kinda Honorine. Le film accorde plus de pouvoir à monsieur Traoré, le juge de la cour qui a plutôt le sacré privilège de rendre justice à la justice pris au piège d'un directeur de la prison corrompu, pervers et orgueilleux. Le directeur est le centre de la prison, car tout part de lui et tout revient à lui. Il est la loi et le rappelle à qui l'oubli. M. Traoré use de son ami Alex, le syndicaliste, pour mettre à nu ce petit dieu de la prison. Les détenues de la cellule 512 qui étaient victimes de viols, de torture, de chantage de tout genre ainsi que tous les autres détenus seront délivrées.

De façon évidente, ces deux films burkinabès problématisent la question de la justice sous des regards quelque peu divergents. Chaque film s'efforce de la rendre au dénouement de son récit, avec cependant des stratégies différentes que l'on pourrait recouper. Dans L'œil du cyclone, le juge passe par une très engagée et tenace avocate pour faire triompher la justice au nom de l'enfant soldat désormais rebelle.
Dans Cellule 512, le juge passe par un fin syndicaliste convaincu, pour assainir le milieu de la prison et permettre à madame Kinda Honorine de redonner vie à sa famille en péril. L'œil du cyclone confronte des acteurs de la justice sur leur scène traditionnelle pour toucher du doigt la vérité dissimulée, ils sont dans l'œil du cyclone ! Cellule 512 s'en tient aux déclarations des victimes pour remettre les choses à leurs places. Comme quoi toutes les voies mènent à Rome. La cellule 512 libère toute la prison des traitements inhumains du directeur et de son acolyte Bougoum, le tyran.

Dans leur combat de redorer le blason de la justice à travers la construction de juges consciencieux, dévoués et assoiffés de justice, les deux films se font un point d'honneur à l'égard de la gent féminine. C'est une façon aussi de rendre justice à cette gent féminine longtemps brimée, en manque de reconnaissance de ses compétences et magnifier sa place dans l'édification du monde. Le caractère bien trempé de l'avocate du rebelle dans L'œil du cyclone répond à l'intégrité et à la dignité dont fait montre madame Kinda Honorine aussi bien dans la cellule 512 que dans la cellule 513.

Le rythme soutenu et le suspens qui jalonne le récit filmique jusqu'à son dénouement confère à l'œuvre de Sékou TRAORÉ une qualité artistique indéniable. En revanche, la linéarité du récit et son dénouement prévisible donnent un caractère commun au film de Missa HÉBIÉ. Ce sont deux créations cinématographiques qui s'acharnent contre la débandade de la justice et bien d'autres vices dont notre société est victime. Ces deux œuvres qui viennent encore confirmer que le cinéma n'est pas simple distraction mais arme de combat pour tous contre tout...!

Valentine PALM SANOU
Burkina Faso

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