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Lamb
L'apprentissage d'un petit Éthiopien
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 30/09/2015
Michel Amarger (magazine Africiné)
Michel Amarger (magazine Africiné)
Yared Zeleke, réalisateur éthiopien
Yared Zeleke, réalisateur éthiopien
Scène du film
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Africiné Magazine, the World Leader (African Cinemas & Diasporas)
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LM Fiction de Yared Zeleke, Ethiopie/France/Allemagne/Norvège, 2015
Sortie France : 30 septembre 2015

La percée officielle du cinéma d'Éthiopie s'inscrit dans l'histoire du Festival de Cannes 2015 avec la présence de Lamb de Yared Zeleke, à la section Un Certain regard, marquant la première sélection d'un film de ce pays. Fort de cette validation, ce long-métrage connaît une diffusion internationale qui fait rayonner les images locales. Pourtant le cinéma éthiopien n'a pas attendu cette reconnaissance occidentale tardive pour circuler sur son territoire et révéler de nouveaux réalisateurs même si la production courante est plutôt orientée vers des histoires commerciales.
Découvrir Yared Zeleke à Cannes n'est pas une surprise puisqu'il a participé en 2013, à l'atelier de la Cinéfondation qui aide chaque année, une quinzaine de réalisateurs à trouver des financements sur projets. Cette présence est un bon atout pour retenir l'attention des sélectionneurs d'autant que le cinéaste de 36 ans a un solide parcours. Formé au cinéma à la New York University, il est l'auteur de plusieurs films courts et de documentaires montés en Ethiopie pour l'United Nations Industrial Development Organization [ONUDI, ndlr]. Lamb est son premier long-métrage de fiction, porté par une coproduction internationale.



Le récit s'attache aux émotions d'Ephraim, un garçon de 9 ans qui vit au nord de l'Ethiopie, dans les régions volcaniques, sèches et désertiques. Sa mère a succombé à une période de famine et son père qui ne peut assurer leur quotidien, le conduit dans la famille d'un oncle éloigné, paysan dans une région plus verte, au sud. Ephraim souffre du déracinement et puise son réconfort auprès de Chuni, sa brebis affectionnée qu'il a fait suivre depuis le foyer paternel. Son attention pour l'animal le tient debout mais tout vacille quand l'oncle annonce qu'il veut abattre Chuni pour la consommer à la Fête de la Croix.
Ephraim imagine alors de fuir avec sa brebis. Pour avoir l'argent du voyage, il utilise ses dons de cuisinier et cherche à vendre des samossas au marché avec l'aide de sa tante. Il se fait une alliée de sa cousine, plus rebelle, qui cherche à échapper à un mariage arrangé pour partir étudier à l'université de Addis-Abeba. Mais les plans d'Ephraim sont semés d'embûches. Il doit confier sa brebis à une bergère pour qu'elle soit épargnée, tout en défendant sa place dans les vastes paysages de la communauté agraire de l'Ethiopie.

L'histoire est inspirée par l'enfance de Yared Zeleke, né dans un quartier pauvre de Addis-Abeba. Exilé à cause de son père, emprisonné pour ses sympathies communistes, le jeune garçon est élevé par sa grand-mère. Il grandit à Washington où le père le rejoint lors de son adolescence. L'idée de se rendre utile au pays motive Zeleke à entreprendre des études d'agroéconomie mais après un séjour en Norvège, il bifurque vers le cinéma en intégrant la New York University. Un diplôme et quelques films courts plus tard, il se retourne vers son pays pour travailler à son premier long-métrage.
"Lamb est à l'image de mon parcours, profondément personnel et inévitablement politique", confie Yared Zeleke. "Il s'agit d'un roman d'apprentissage, semi-autobiographique, imprégné par le chagrin, le courage et l'humour qui caractérisent la vie de mon pays." Et le réalisateur cultive un ton légèrement mélo pour émouvoir sur le sort de son héros. "Lamb pourrait être un conte", relève-t-il. "Mais l'histoire est profondément réaliste et se déroule dans la rudesse de l'existence des fermiers éthiopiens." De fait, le cinéaste emploie les codes de narrations classiques pour séduire un vaste public, en pointant les caractéristiques de sa communauté.

Lamb montre un monde rural éprouvé par la sécheresse, l'exhortation impossible à l'exportation, tandis que la vie est rythmée par des codes stricts comme le mariage arrangé des filles, la priorité à l'éducation agricole, les pratiques religieuses rigides, la suprématie patriarcale et l'autorité des aînés matérialisée par la grand-mère. "Je pensais qu'il était temps que les Africains racontent leurs propres histoires, nourries de leurs vies", souligne Yared Zeleke.
Son ambition vise à bousculer le marché local pour imposer un cinéma d'auteur "quasi inexistant en Ethiopie", selon lui. "On estime hélas que les films sont simplement des produits commerciaux comme les autres", déplore-t-il. Épaulé par la productrice anglo-nigérianne (parfois créditée comme Ghanéenne) Ama Ampadu, le réalisateur a mobilisé une production locale avec le concours de la France, l'Allemagne, la Norvège. Des alliés de poids pour relever les moyens de la créativité en Ethiopie sans s'écarter des questions de déplacements, d'exode, qui touchent les citoyens. Une situation en forme d'initiation vitale pour le héros de Lamb et sa communauté.

Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France),
pour Africiné

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