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L'Oeil du Kwatt 2016
Le film de quartier se fait à Mfou
critique
rédigé par Martial Ebenezer Nguéa
publié le 25/07/2016
Martial Nguéa (Africiné Magazine)
Martial Nguéa (Africiné Magazine)

Du 24 au 28 aout prochain, la première édition du festival international du film de quartier se tiendra à Mfou, localité située à 22Km de la ville de Yaoundé.


Au cours d'une rencontre avec des responsables des services culturels de la coopération culturelle internationale au Cameroun, quelqu'un faisait remarquer le flux de festivals qui s'implantaient uniquement dans les grands centres urbains tels Yaoundé, Douala, Bafoussam. La plupart des festivals préféraient s'installer dans ces villes pour avoir plus de visibilité et un suivi médiatique important. C'est pour donner une réplique à ces dires que l'Association Jeunesse Consciente Rue plus sûre (Jecords) a créé le Festival international du film de quartier, encore appelé "L'œil du kwatt" : un argot camerounais qui signifie "Le Regard du quartier".

Pas évident pour ce genre d'activités dans un pays où le cinéma est moribond et sans véritable politique de diffusion. Cette autre rencontre annuelle est itinérante. Elle se fera toujours hors des sentiers battus des métropoles. Jecords a en son sein des jeunes réalisateurs et producteurs tels Rostand Wandja, Nabe Daone, la jeune réalisatrice Agnès Yougang, tous des jeunes cinéastes locaux qui affutent leur art depuis les années 2010. Ils ont confié la direction de ce festival au scénariste et producteur Guy Djomo.
"Nombreux sont des producteurs, réalisateurs et autres artistes restent inconnus du grand public cible ou encore proche. Le festival veut amener le cinéma vers sa cible c'est-à-dire vers les populations des quartiers défavorisés et les périphéries urbaines, des municipalités mal servies par les évènements culturels d'envergure surtout le cinéma.", a expliqué le Directeur du festival, Guy Djomo. Leur projet de diffusion, de formation et d'éducation à l'image s'ancre véritablement dans le cinéma de proximité et de caractère à travers les quartiers et les villes environnantes de la capitale Yaoundé. Il vise en moyenne 100 000 personnes par édition.

Mfou, hors les murs

C'est la ville de Mfou, située à 22km de Yaoundé, qui ouvre le bal de la première édition du festival international L'œil du Kwatt. Pour cette première édition, le festival s'étalera sur trois jours dans cette petite bourgade. Il comprendra des ateliers d'initiation à l'écriture du scénario et de formation en direction d'acteur. Ces formations sont coordonnées par l'association des Dames de l'Image du Cameroun (Adamic), avec le soutien de l'Association des journalistes et critiques de cinéma du Cameroun (Cinepress).

On est assez loin des facilités qu'offrent les grands centres urbains dont bénéficient les évènements se tenant dans ces villes. Difficile de parler de cinéma dans les zones rurales sans évoquer les obstacles liées à l'implication des municipalités, l'accès à l'électricité et autres structures d'accueil des festivaliers. Cette commune modeste a souhaité s'investir en quelques points. Selon son Maire, Roger Belinga, elle mettra à la disposition du festival des sites et des Chefs des communautés pour faciliter la mobilisation des populations dans leurs contrées respectives.

Au total 31 films sont sélectionnés dont deux films étrangers seulement. Curieusement tous des courts métrages. "C'est heureusement une coïncidence pour cette édition. Selon nos critères, ces films qui ont un réel impact sur le quotidien des populations ont retenu l'attention du jury présélection" se défend le directeur Guy Djomo. Parallèlement aux projections, il sera réalisé une carte postale de la ville pour présenter l'histoire et le patrimoine de cette municipalité. Il est prévu également des excursions en vue des repérages pour des éventuels projets de films. En misant sur la curiosité des festivaliers, il n'en fallait pas plus pour rendre ce festival plein dans le quartier.

Films populaires, regard sur le quartier

Même si les films ne disposent pas d'une variante thématique précise, il n'en demeure pas moins le caractère populaire de leur sélection. Elle favorise la réception populaire des films. Parmi les deux films étrangers de la sélection, on aura en première diffusion Habib de la Gabonaise Patricia Nguema. Un portrait d'un jeune de Libreville qui subit la vie et son destin. Victoire du Français Benjamin Rancoule est un court métrage poignant de 8 minutes sur le cancer. Il présente le combat d'un jeune homme contre un cancer du poumon, représenté par une femme toujours présente dans son quotidien. Le film a été déjà salué dans d'autres festivals avant sa diffusion camerounaise.
L'enjeu de ces films est de brandir un regard proche et simple des populations dont le niveau de culture n'est pas toujours élevé. Parmi les films camerounais, on retrouve La sottise de Elise Kameni qui traite de la question des rivalités entre gendre et beaux-parents en Afrique tandis que Chut de Nabe Daone parle de la sexualité dans les quartiers populaires, en mettant en exergue les préservatifs usagés et ramassés par des enfants. L'idée majeure pour les promoteurs vise aussi à sensibiliser les populations à la fois à l'image et à la prise de conscience de leur quotidien. Le patriote de Jean Marc Anda replonge dans le débat de l'engagement des jeunes camerounais au front contre la secte terroriste Boko Haram.

Mes vampires de Frank Thierry Lea Malle, le dernier Lauréat du concours "10 jours pour un film" organisé par Écrans Noirs 2016 en partenariat avec l'institut Goethe. Ce premier court-métrage aborde la question de sorcellerie et d'insertion des jeunes dans les villages en Afrique. Dans la même veine G&M, de Rostand Wandja aborde l'intégration des albinos dans la société. Il démontre dans un court métrage de 18 minutes, l'exclusion de cette partie de la population qui commence au sein de leur famille biologique pour prendre des proportions dans les rues. Le film a été diffusé plusieurs fois et a reçu un accueil très populaire.
Au chapitre des documentaires, Le Mythe de Mapout de Félix Mbog-Len Mapout. Ce documentaire tiré d'une histoire personnelle, raconte le destin d'un des fidèles compagnons d'Um Nyobe le héros de la libération du Cameroun. Benjamin des Mapout, il n'a pas connu son géniteur car il fut en exil à sa naissance et décéda très tôt. Cependant, il cherche à comprendre le mythe qui entoure son destin à travers ce film.

Globalement, ces films sont déjà diffusés à travers des festivals locaux. Même si les films de fiction dominent la programmation, l'idée majeure de faire du cinéma un instrument de développement communautaire demeure.

Martial Nguea

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