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Makala : une vie de charbonnier congolais
Un film de Emmanuel Gras
critique
rédigé par Falila Gbadamassi
publié le 26/05/2017


Kabwita Kasongo est marié à Lydie, il a trois enfants et vit à Walemba, dans les environs de la ville de Kolwezi, au Katanga en République Démocratique du Congo (RDC). Sa profession : charbonnier. Et il est le héros de Makala, qui veut dire "charbon" en swahili, le documentaire du cinéaste français Emmanuel Gras qui a décroché le Grand Prix de la Semaine de la Critique.






"J'ai travaillé avec lui, je n'ai pas simplement fait un film sur lui, explique le cinéaste. On a fait le film ensemble. J'aime dire que c'est un acteur, même si c'est un documentaire, et non pas une reconstitution". "D'une certaine façon, admet-il néanmoins, ce que fait Kabwita est très influencé par nous. Ce n'est pas un documentaire "capté sur le vif" où l'on ne serait sensé que suivre les événements (...) Cela dit, au moment où nous filmions, nous n'intervenions pas (...)".
De la coupe de l'arbre jusqu'à la vente du charbon, Emmanuel Gras documente, grâce à un dispositif léger - "une caméra à l'épaule et un appareil photo assorti d'un petit système de stabilisation" - le dur labeur d'un homme qui tente d'offrir une existence décente aux siens.






Le cinéaste nous fait partager l'effort permanent de Kabwita Kasongo qui s'attaque d'abord à un gigantesque arbre, qu'il filme de long en large pour bien rendre compte de son immensité, avec sa petite hache, puis à la construction du four qui lui permettra de produire le charbon qu'il faut acheminer ensuite sur des dizaines et des dizaines de kilomètres sur son petit vélo pour, enfin, accéder aux acheteurs.

Dans les pas d'un tâcheron

En filmant dans la longueur les différentes étapes de ce processus harassant et grâce à un subtil travail sur la photo, Emmanuel Gras donne une acuité saisissante à son documentaire. Notamment, pendant le transport des sacs de charbon sur des chemins escarpés et les routes de fortune de cette région congolaise, au milieu de véhicules défiant toutes les règles du code de la route.
Seul, aux commandes de sa bicyclette surchargée et à l'aide d'un petit bâton, Kwabita Kasongo plie sous l'effort mais ne rompt jamais. Tel un roseau. Peut-être parce qu'il a compris depuis longtemps que son ingrate besogne est la clé de sa survie. Du pragmatisme, jamais de la résignation.
Mais de l'autre côté de l'écran, c'est une admiration certaine accompagnée d'un irrépressible sentiment d'injustice qui étreint le spectateur. Ce dernier ne peut que se désoler de voir que tant de souffrance ne permette même pas au charbonnier héroïque de Makala de s'offrir ce dont il rêve vraiment.






Kabwita Kasongo est l'un de ces héros ordinaires qui s'échine au travail pour tenter de sortir de la pauvreté et que l'on retrouve en RDC, en particulier, et n'importe où sur la planète en général. Jusque-là, rien de nouveau sous le soleil. Makala trouve sa singularité dans le fait qu'il dresse le portrait d'un homme qui n'a pas (encore) renoncé.

Falila Gbadamassi, correspondance spéciale

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