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Un roseau nommé Sofia
Un film de Meryem Benm'Barek
critique
rédigé par Falila Gbadamassi
publié le 16/05/2018
Falila Gbadamassi est rédactrice à Africiné Magazine
Falila Gbadamassi est rédactrice à Africiné Magazine
Meryem Benm'Barek, réalisatrice
Meryem Benm'Barek, réalisatrice
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Lena (Sarah PERLES, en blouson noir) et Sofia (Maha ALEMI, en vert)
Lena (Sarah PERLES, en blouson noir) et Sofia (Maha ALEMI, en vert)

Sofia, le premier long métrage de la Franco-Marocaine Meryem Benm'Barek projeté le 16 mai 2018 à Un Certain Regard, est un drame social dont le décor est une société aux principes encore rétrogrades. La jeune cinéaste livre une œuvre épurée au service d'un somptueux portrait de femme, interprétée avec brio par Maha Alemi.


Sofia (Maha Alemi) est une sage jeune fille de 20 ans qui découvre, par hasard, qu'elle est enceinte et surtout qu'elle est sur le point d'accoucher. Au Maroc, mettre au monde un enfant en dehors des liens du mariage est un crime. Aidée par sa cousine Lena (Sarah Perles), la jeune femme a quelques heures pour retrouver le père de son enfant, un certain Omar (Hamza Khafif).

Une certitude : Sofia n'est pas une jeune fille très expressive. D'ailleurs, on lui reprocherait presque de ne pas être plus expansive quand elle entraîne toute sa famille dans cette "épreuve", considérée comme particulièrement humiliante dans la société marocaine.
Notamment quand sa cousine Lena, qui vient à son secours dès les premières heures du drame, lui demande d'éclairer sa lanterne. Sofia a des problèmes mais ce n'est pas pour autant qu'elle attire de facto la sympathie. Et l'un des remarquables tours de magie de Meryem Benm'Barek est de faire d'elle, scène après scène, une femme qui finit par forcer respect et admiration.

Le personnage principal de Sofia est une héroïne dans un univers de maîtresses femmes (la mère, la tante et la cousine de Sofia sont les principaux protagonistes du long métrage). Dans la fiction de Meryem Benm'Barek, les hommes (le père de Sofia et le géniteur de son enfant), contrairement aux apparences, sont des accessoires, même s'ils peuvent aussi causer d'irréparables torts.

Le stoïcisme de Sofia est la facette la plus visible d'une conduite héroïque. Son déni de grossesse, le rejet et la colère de ses parents, sa maternité nouvelle sont des épreuves que la jeune femme semble traverser avec indifférence. Son visage, filmé en gros plan, est presque toujours impassible. Mais quand Sofia sourit, c'est pour donner le change et peut-être surtout pour affirmer qu'en dépit des circonstances, elle reste maîtresse de son destin. Y compris dans une société qui oppresse les femmes et ne leur laisse, par conséquent, peu ou pas de marge de manœuvre. Une leçon de féminisme, sans tambour ni trompette.






Meryem Benm'Barek a produit un scénario d'une finesse et d'une intelligence rares. Elle a su, de surcroît, le mettre en images avec les mêmes qualités. Maha Alemi, qui porte le film, est également une belle révélation. Cette première œuvre, parfaitement maîtrisée, est une nouvelle preuve de la vitalité du cinéma marocain.

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