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BOY FROM HEAVEN, un étudiant-espion à Al-Azhar !
critique
rédigé par Falila Gbadamassi
publié le 23/05/2022
Falila Gbadamassi, rédactrice à Africiné Magazine
Falila Gbadamassi, rédactrice à Africiné Magazine
Tarik Saleh, réalisateur et scénariste égyptien suédois
Tarik Saleh, réalisateur et scénariste égyptien suédois
Scène du fim
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"Le Caire Confidentiel (The Nile Hilton Incident)" (2017), réalisé par Tarik SALEH
"Le Caire Confidentiel (The Nile Hilton Incident)" (2017), réalisé par Tarik SALEH
Cannes 2022
Cannes 2022

Tarik Salek a choisi une fois encore de poser sa caméra, en Egypte qui est avec, la Suède, l'une de ses deux patries. Boy From Heaven, un superbe film d'espionnage sur les luttes de pouvoir entre religieux et politiques est en lice pour la Palme d'or de la 75e édition du Festival de Cannes.

Adam va quitter son village et la pêche… pour intégrer la prestigieuse université Al-Azhar, épicentre du pouvoir de l'Islam sunnite. En faisant ses adieux à sa famille et à son imam, il n'imagine pas le guêpier qui l'attend au Caire où il est censé approfondir son éducation religieuse. La disparition brutale du Grand imam d'Al-Azhar va le plonger dans une vertigineuse guerre d'influence dont l'enjeu pour le pouvoir politique est de tenter de contrôler cette puissante institution religieuse. L'étudiant est ainsi approché par le colonel Ibrahim qui exige de lui des informations capitales pour installer un nouvel Grand imam qui sera à la solde du régime.



L'acteur Tawfeek Barhom incarne avec brio un stoïque Adam dont on se demande à chaque plan, serré sur son visage, pourquoi il n'oppose aucune résistance aux exigences du colonel Brahim. Ce sbire du pouvoir, incarné par un Fares Fares vieilli que Tarik Saleh retrouve après leur fructueuse collaboration dans Le Caire confidentiel (2017), est sans état d'âme même s'il semble s'adoucir avec le temps au contact d'Adam. Peut-être parce qu'il admire l'intelligence de sa nouvelle recrue. De fait, au fur et à mesure qu'Adam prend conscience du rôle central qu'il joue dans cette lutte d'influence, le jeune homme s'affirme auprès du colonel Ibrahim et décide de la conduite à tenir pour conduire sa mission. De même, en dépit du nid de vipères dans lequel il évolue, Adam ne semble pas perdre la foi, bien au contraire. Il s'avère être, au fur et à mesure de l'évolution des intrigues, être un fin stratège. Une nécessité en l'occurrence pour sauver sa peau.

L'instinct de survie de l'étudiant se déploie alors dans les somptueux et imposants décors de l'université Al-Azhar, reconstitués à Istanbul (Turquie). Contrairement à la façon dont il filme ses protagonistes, Saleh souligne régulièrement la magnificence des lieux avec de très larges plans. Celui sur les arcades du bâtiment est particulièrement époustouflant. Au final, le cinéaste suédois et égyptien, qui tient la caméra et qui signe le scénario, orchestre un trépidant film d'espionnage qui met en scène deux réalités parallèles.

A savoir l'ivresse du pouvoir d'une dictature militaire - les portraits du président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi sont immanquables dans certaines scènes de cette fiction - et l'hypocrisie qui règne chez ces docteurs de l'islam. Ces derniers n'hésitent pas à adapter les préceptes divins à leur réalité, ne serait-ce que pour s'offrir un vulgaire hamburger. Par exemple, quand Cheikh Dourhani, l'un des prétendants au siège du Grand imam, réclame un Mc Do à son nouvel assistant, il ne manque pas de souligner que la viande commercialisée par le géant du fast food est halal. Une remarque qui en laissera dubitatif plus d'un.

En plus de nous tenir en haleine, Saleh nous offre quelques scènes assez inoubliables. Parmi elles, ce concours de chants qui, tout prenant des allures d'intermède musical, rappelle bien que rien n'est jamais vraiment laissé au hasard dans cet univers clos.

S'il est, sans aucun doute, question pour l'Etat égyptien d'éviter tout antagonisme avec Al-Azhar, le film de Tarik Saleh fait peut-être davantage allusion à une convergence d'intérêts. De fait, Boy From Heaven (Walad min Al Janna) est un regard lucide sur la similaire quête de pouvoir entre les religieux et les politiques qui, au fond, ne peuvent que s'accorder. Si Al-Azhar et le régime ne sont pas sur la même longueur d'ondes, assène d'ailleurs le Grand imam finalement choisi, ce sera "la guerre civile" en Égypte. CQFD ?

Falila Gbadamassi, correspondance spéciale

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