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TIRAILLEURS. Une histoire de transmission père-fils
Un film de Mathieu Vadepied, France, 2022, avec Omar Sy
critique
rédigé par Sitapha Badji
publié le 04/01/2023
Sitapha BADJI, Rédacteur (Dakar) à "Africiné Magazine"
Sitapha BADJI, Rédacteur (Dakar) à "Africiné Magazine"
Mathieu VADEPIED, réalisateur et coproducteur français.
Mathieu VADEPIED, réalisateur et coproducteur français.
Omar SY ("Bakary"), acteur et producteur français-sénégalais.
Omar SY ("Bakary"), acteur et producteur français-sénégalais.
Scène du film
Scène du film
Omar Sy (soldat Bakary Diallo)
Omar Sy (soldat Bakary Diallo)
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Omar SY entouré par une partie de l'équipe du film, Cannes 2022
Omar SY entouré par une partie de l'équipe du film, Cannes 2022
Alassane Diong (Thierno)
Alassane Diong (Thierno)
Alassane Sy, acteur sénégalais (un des rôles principaux)
Alassane Sy, acteur sénégalais (un des rôles principaux)
Affiche 75è Festival de Cannes, 2022
Affiche 75è Festival de Cannes, 2022

Tirailleurs a été projeté en avant- première à Dakar le 20 décembre 2022, en présence de sa tête d'affiche l'acteur franco-sénégalais Omar Sy. Le film est réalisé par Mathieu Vadepied. Il a été présenté en mai dernier au festival de Cannes. Le film sort en France le 4 janvier 2023 et dans les salles africaines le 6 janvier 2023. Il explore la relation entre un père et son fils devenus tirailleurs sur un champ de bataille de la première guerre mondiale. Faut-il que le père laisse sonfils choisir sa voie plutôt que de s'obstiner à le sauver ?

En novembre 1920 vers Verdun fut découvert des ossuaires d'un "soldat inconnu", inhumé sous l'Arc de Triomphe. C'est le fil conducteur du film, Tirailleurs. En 1917, Bakary (Omar Sy) s'enrôle dans l'armée française pour rejoindre et protéger son fils de 17 ans, Thierno (Alassane Diong), enlevé de force par des soldats aux ordres de la France, pour aller "libérer la mère patrie".



Au front, la trame de fond est le lien entre Bakary et son fils. Au fil de la montée paroxystique du film, alors que son père va tout faire pour l'arracher aux combats et le ramener sain et sauf, Thierno va s'affranchir et apprendre à devenir un homme. Le drame suivra son cours jusqu'au bout, d'autant que le père s'érigera en bouclier pour sauver la vie du fils et le bénit.

Le plan d'ensemble met en exergue le chaos, la désolation et la mort sur le champ de bataille. Des lumières blafardes et des volutes de la brume renforcent la pesanteur de ces images. Des tirailleurs venus de diverses parties de l'Afrique essayent de survivre dans cette jungle malgré la complexité des rapports. La diversité des langues parlées par les tirailleurs souligne leur difficulté de compréhension. Tandis que le père ne parle que sa langue halpoular, son fils s'exprime aussi en français.

Omar Sy dira à ce titre, qu'une série de choses lui sont personnelles dans cette fiction. Il y a sa langue maternelle, le peulh, mais aussi la relation entre père et fils. Pour l'acteur qui a largement participé à la production du film, il s'agit effectivement avant tout d'une relation père-fils. Donc, une histoire de transmission entre Bakary et Thierno.
Mais cette fiction aux relents intimistes est aussi un devoir de mémoire sur un pan de l'Histoire, entre un pays colonisateur, la France, et une colonie, le Sénégal et l'Afrique de l'Ouest par extension. S'agit-il de la relation de paternité entre le pays colonisateur et les colonies ?

Le contraste entre la lumière d'Afrique et l'obscurité de l'Occident évoque le déracinement. Un général aligne les promesses : "la citoyenneté française, la reconnaissance de la patrie". Mais elles ne seront jamais tenues. Elles ne sont pourtant pas évoquées dans le film. Pour le réalisateur français, cela peut faire l'objet d'un autre film. Situé au sortir d'un autre conflit, la seconde guerre mondiale, Camp de Thiaroye, d'Ousmane Sembene (1988), avait déjà rappelé cette "injustice". Dans Tirailleurs la question de l'injustice aurait pu être davantage exploité.

DEVOIR DE MÉMOIRE

Si Tirailleurs fait également œuvre de devoir de mémoire, c'est qu'il aborde frontalement le traitement humain sur le champ bataille. Est-ce ce film parle au jeune Africain ? Pas vraiment. Cependant, il donne la parole aux soldats noirs envoyés en guerre en terre étrangère. C'est une façon de dire, comme le souligne Omar Sy, que le "Soldat inconnu" reposant à l'Arc de triomphe pourrait être un des Tirailleurs (combattants africains) qui ont donné leurs sangs pour libérer la "mère patrie, reconnaissante à titre posthume".
Il s'agit pour lui de répondre au besoin d'une génération nouvelle que de parler de la première guerre afin de se construire une identité par la prise en compte de cette Histoire. Il s'agit de lever le voile sur des parties sombres de l'Histoire de l'humanité que les générations précédentes ont passées sous silence. Pour l'acteur franco-sénégalais : "c'est une partie de l'histoire française occultée, sous- étudiée à l'école, que ne racontent pas les parents…"
Tirailleurs laisse ainsi aux cinéphiles un sentiment d'inachevé dans les interrogations de l'Histoire, telle la tombe anonyme du "Soldat inconnu".

Sitapha BADJI

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