Une femme battue doit-elle se résigner ou s'en libérer ? C'est la question de Breaking Ground (Nouvelle voie, 13 min, 2021). L'action se déroule au Rwanda.

Une des fonctions essentielles du cinéma est de faire d'une peur un courage : Anna passe de l'ombre de son logement à la luminosité finale. Anna est battue, son visage en porte les traces. Elle est dominée, réduite au silence par son mari, homme pervers qui s'excuse pour recommencer. Elle tait sa souffrance jusqu'à ce qu'un point soit atteint qu'elle ne peut accepter : la bouilloire se met à bouillir. Elle ressent du mépris et tchippe.



Le film l'accompagne et, à la faveur de plans rapprochés sur son visage triste, nous permet de ressentir de la compassion envers Anna, emblématique de toutes les femmes victimes de violences, et de la colère face au mari. Il invite au passage à un autre regard sur les apparences : les femmes noctambules sont-elles plus libres ? Le septième art montre en exhibant sans le dire ni l'écrire. Le visage tuméfié de la victime résume en soi la problématique de la violence.

Le problème d'Anna est d'arriver à faire face plutôt que de rester dans le silence. Sa solution est d'aller chercher le soutien d'autres femmes et de se réfugier dans cette sororité et d'adopter ses codes. Le film change alors de registre, rapproche sa caméra des corps, sort de l'ombre pour saisir les solidarités. Une parole poétique résume alors l'enjeu : affirmer sa liberté.

Emile DASYLVA (Sénégal)

Article rédigé dans le cadre de l'Atelier Dakar Court 2022 / FACC.
Atelier de formation en critique cinématographique dirigé par Olivier Barlet et Baba Diop, organisé à l'occasion de la 5è édition du Festival de Dakar Court par le Festival, Association Cinemarekk et la Fédération Africaine de la Critique Cinématographique (FACC, Dakar).