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SHIMONI. Le scénario du drame et de l'humour
Un long-métrage, d'Angela Wamai, 2022, Kenya
critique
rédigé par Bassirou Niang
publié le 04/03/2023
Bassirou NIANG (Dakar), Rédacteur à Africiné Magazine
Bassirou NIANG (Dakar), Rédacteur à Africiné Magazine
Angela Wanjiku WAMAI, réalisatrice et scénariste kenyane
Angela Wanjiku WAMAI, réalisatrice et scénariste kenyane
Scène du film
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Justin Mirichii, acteur principal de SHIMONI
Justin Mirichii, acteur principal de SHIMONI
La cinéaste Angela Wamai recevant son trophée (Etalon de Bronze) au Fespaco 2023
La cinéaste Angela Wamai recevant son trophée (Etalon de Bronze) au Fespaco 2023

L'image (d'ensemble) de Shimoni vacille entre un personnage principal lugubre - un enseignant laminé psychologiquement par les affres d'un séjour carcéral - et de l'humour noir qui apaise (?). L'humour d'une grand-mère ne s'embarrassant point de codes, au point de tancer cyniquement le prêtre du village lors d'un différend.
SHIMONI (2022) a remporté l'Etalon de Bronze au FESPACO 2023 (Ouaga), après le Toutankhamon d'Or 2023 (Luxor) et une nomination dans la compétition officielle de la deuxième édition du Red Sea IFF de Djeddah (1-10 décembre 2022).

C'est le premier long-métrage fiction de la réalisatrice kenyane Angela Wamai (réalisé en 2022, d'une durée de 1h37). Il ramène, comme un ressac, la souffrance sociale d'un ex-prisonnier éprouvé plus par le jugement de l'infâme tribunal de sa conscience que par le remord de son propre acte qui lui a valu sept précieuses années de sa jeunesse. Un prisonnier tyrannisé aussi par la haine d'un homme qui symbolise toute sa déchéance personnelle et sentimentale.



Un homme, Geoffrey, malgré le fait d'avoir eu le privilège de s'éloigner de la prison, n'arrive pas à se reconstruire. Et pourtant, le lieu de Re-naissance n'était autre que l'église du père Jacob, espace de repentir et de rédemption pour les âmes souillées et désespérées pour s'ouvrir de nouveau à l'amour du Seigneur. Mais l'exercice lui semble un éternel chemin de croix ! Une odyssée sans fin ! Ni l'empathie du prêtre ni la teneur mystique des passages de Bible lus sous la lumière de la lampe tempête n'ont pu entamer son aigreur face au désespoir d'un destin lamentable. Geoffroy, de jour en jour s'éloigne de l'espoir d'être cette âme attendue dans le juste chemin. Il n'a pu prendre cette revanche sur le mal et sur la société.

Son généreux don de répétiteur de la nièce de grand-mère Martha laisse entrevoir que le temps de guérison n'est pas si loin, que le repentir espéré de lui pouvait y contribuer. Egalement, l'amour de Béatrice, la jeune fille du village qui s'était éprise de lui, ferait partie des charpenters d'une nouvelle vie d'un homme en marche vers le futur. Mais la jeune réalisatrice, Angela Wamai, a choisi de faire abdiquer cet élan d'humanité, pour le tendre vers le renoncement. Un choix qui renseigne sur l'intention de celle-ci de ne pas peindre au cinéma un héros social, mais une victime d'elle-même. Comme pour grossir les traits d'une ignominie sociale qui cause des malheurs.

Shimoni, c'est une tentation au renoncement et un choix de filmer sans cocher les cages conventionnelles jusque-là connues, même si, dans certaines scènes, on sentait un mouvement vers celles-ci. Outre Geoffrey, le rôle le plus captivant dans ce film est celui de grand-mère Martha, celle par qui Angela fait passer l'humour, comme pour atténuer la lourdeur du mal d'une communauté aux individualités éprouvées par les épreuves. On en poufferait de rire tout comme on verserait secrètement des larmes, si tant est que nous soyons émotifs.
Un humour comme exutoire aussi bien pour elle que pour ceux qui passent devant la caméra…pour affronter l'amour, la mort et le mal. Des réalités d'une condition humaine rencontrées dans le scénario pour marquer le drame né de la descente aux enfers d'un personnage principal.

Angela Wamai a pourtant réussi à allier le ressassement d'un mauvais destin à la beauté d'une nature dans laquelle sont nichés les lieux de tournage. Le décor enchantant servirait de consolation à un spectateur frappé ‘'d'un coup de poing sur le crâne'' par la fin avec Geoffrey malade de lui-même, face aux fausses tentations du bien…La haine n'a pu, lui donner la force de se venger d'un homme qu'il juge porter la paternité de son malheur. Sa main n'a pas été si forte pour attenter à la vie de ce dernier. Est-ce un manque de courage ou le cours incompréhensible d'un destin ?
Les acteurs, loin d'être des habitués de la scène, n'ont pourtant, au vu du jeu, aucune difficulté à se mettre dans la peau de leurs personnages respectifs. Une tendance de plus en plus progressive dans les cinémas africains d'aller vers des amateurs, parfois mieux à même d'incarner le rôle qui leur est attribué.

Bassirou NIANG
, Correspondant spécial au Red Sea Festival (Djeddah, Arabie saoudite)

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