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Sur les chemins de la rédemption
Tsotsi, de Gavin HOOD
critique
rédigé par Yvette Mbogo
publié le 24/08/2006

Atelier de Yaoundé - 10ème FENCAF (Festival Ecrans Noirs).

Passer une enfance dans un environnement violent est nocif pour l'évolution de tout être humain dans la société. Tôt ou tard, les souvenirs de ces instants de vie finissent par transformer négativement celui qui les a vécues. Freud ne disait-il pas que "l'enfant est le père de l'homme" ? Dans une société où les inégalités sociales perdurent, où assurer sa pitance n'est pas chose aisée, surtout si on a pour logis la rue, comment échapper au grand banditisme urbain et garder un brin d'humanisme en soi ? C'est toutes ces interrogations qui sont transposées dans le film du réalisateur sud-africain Gavin Hood.
C'est l'histoire d'un jeune garçon aigri et malheureux qui devient un grand brigand. Las d'être témoin oculaire des querelles de ses deux parents, Tsotsi quitte le domicile parental et décide de trouver refuge dans la rue. Mais, la rue a ses lois, ses règles et c'est une jungle où c'est le plus fort qui y résiste. Et pour s'en sortir, ils forment un quatuor d'enfer, qui volent, se droguent, tuent et dépouillent leurs victimes de tous leurs avoirs. Un jour, il tire sur une femme et lui vole son véhicule ; après une bonne distance, les pleurs d'un bébé installé à l'arrière de la banquette arrière de l'auto vont changer le cours de son existence. Que faire avec un bébé entre les bras si on ne sait pas tout ce qui concourt à l'hygiène, la nutrition et la santé du nourrisson. A partir de ce vol de bébé va se nouer l'intrigue du film. Malgré la cruauté et le cynisme de Tsotsi, il va s'éprendre du nouveau-né au point d'utiliser tous les moyens pour le faire vivre. Il ira même braquer une jeune mère, veuve de l'une de ses multiples victimes pour allaiter au sein "son bébé" et lui donner son nom, David.
Plus encore, il se ravise au moment de tuer un mendiant handicapé parce que ce dernier lui relate comment il a perdu l'usage de ses jambes. Au fur et à mesure que le film évolue, Tsotsi est envahi par de bons sentiments, la compassion. Il comprend combien ôter la vie à un être humain est la pire des choses que l'on puisse faire. Le dernier coup qu'il opère avec ses complices les dirige inexorablement dans le domicile des parents de sa "trouvaille". seuls les aliments, le linge et les biberons vont l'intéresser. Malheureusement, son complice qui tente d'éliminer le maître des lieux sera buté par Tsotsi, histoire de sauver le père du bébé.
Ramenant son butin au domicile de la "nourrice" du bébé, il va découvrir la joie, le bonheur d'une vie de famille et lorsqu'il réalise qu'il est le bourreau de l'époux de la jeune femme, il s'en veut. Chaque fois que le héros veut revenir à de meilleurs sentiments, son histoire le rattrape comme s'il fallait qu'il prenne conscience de ses actes et arrête de faire de la peine aux autres. C'est ainsi qu'à la fin du film, il décide de remettre l'enfant à ses parents.
Le réalisateur se sert des plans moyens pour toucher du doigt la violence, afin de la justifier. Tsotsi est un film iconoclaste, loin des clichés figés qu'on a du cinéma africain. L'œuvre s'inscrit dans la démarche de la dualité : violence et tendresse, pauvreté et opulence, et on le voit à travers les images contrastées, la brume des ghettos, les lumières chatoyantes des quartiers chics. La musique, mélancolique, vient rehausser l'intensité de l'émotion dans les scènes. Les dialogues sont moindres et l'action est mise davantage en exergue. Fort et bien porté par son acteur principal (Presley Chweneyagae) dans son rôle, le film se termine sur une note positive : quel que soit le comportement néfaste d'un individu, il faut lui donner la possibilité de se racheter dans la société.

Yvette Mbogo

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