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Abîmes faciles
Le rêve brisé, de Ghislain FOTSO
critique
rédigé par
publié le 02/10/2006

La jeunesse camerounaise s'écroule devant la caméra de Ghislain Fotso.

Une grossesse non désirée. Un Avortement. Le Sida. Un trio avec lequel une jeune étudiante va faire de malheureuses rencontres. La vie de Coralie était pourtant sans histoires, jusqu'au moment où l'héroïne va emprunter des raccourcis, par un "sponsor", pour mener la belle vie, la mauvaise compagnie aidant. Elle va commettre l'inceste, déshonorer sa mère. Ghislain Fotso, le réalisateur, aborde un thème récurrent, mais jamais résolu, le mode de vie qu'adopte la jeunesse camerounaise.

Dans la construction artistique du film, des symbolismes apparaissent. La conscience et ses deux voix, incarnées par les deux amies de Coralie. Liz, la femme fatale, en référence à la sulfureuse Liz Taylor, et qui entraîne Coralie sur les sentiers de la perdition. Nathalie quant à elle, est la fille rangée qui donne toujours des conseils judicieux.

Par ailleurs, il y a la famille de Coralie, dont on choisit d'occulter la présence du père et des frères. Ils sont justes évoqués et de plus, en termes flatteurs par l'héroïne, pendant qu'elle rend sa mère responsable de tous ses malheurs. Ainsi, un enfant ne peut avoir une vie équilibrée qu'au sein d'une famille présente.

Pour mieux illustrer l'acculturation des jeunes, Dylan, le petit ami de Coralie, par ailleurs son cousin, ce qu'elle ignorait, donne en euros le prix d'un vêtement qu'il a pourtant acheté dans un marché de la ville. Le réalisateur a choisi, pour la majorité, des femmes plantureuses, signe de générosité, et dans le cadre de l'œuvre, de générosité sexuelle. Les notes de piano de la seule musique du film sont ambiguës. Elles renvoient aussi bien à la tristesse, à l'amour, mais, elles restent dans la constance de la mélancolie.

Froid

Malgré tous ces symbolismes, qui auraient pu assurer l'intérêt social de l'œuvre, le schéma narratif de Rêve brisé est quand même gâché par la distribution qui rend l'œuvre quelque peu surréaliste. La mère et le "sponsor" de Coralie pourraient avoir le même âge que l'héroïne. Le jeu figé, raide et inexpressif des acteurs rend l'intrigue froide. Ils ne rentrent pas dans le schéma psychologique des personnages qu'ils incarnent. Aucun comédien n'arrive à se démarquer des autres. Pour preuve, les voix, masculines comme féminines, sont toutes sur la même fréquence. Elles sont monocordes et n'expriment pas les émotions que les personnages devraient avoir, colère, tristesse, joie, sensualité.

Les plans serrés, très affectionnés par le réalisateur, expliquent en partie, hormis la mauvaise direction des acteurs, l'économie des mouvements que les comédiens effectuent. Ce qui laisse planer une ombre de confinement et d'étouffement, renforcée par le fait que la majorité des scènes sont tournées en intérieur. Les costumes ne reflètent pas la psychologie des personnages. Nathalie, la fille rangée, revêt, comme les dévergondées qu'elle critique, des vêtements qui mettent en exposition ses formes.

L'ellipse n'est pas correctement exploitée. Des scènes indispensables à la bonne compréhension du film sont supprimées. Mais d'un autre côté, les dialogues sont trop longs et les textes n'ont pas de force dramatique pour capter l'attention du spectateur.

Le film est en définitive un message, encore un de plus, de lutte contre le Sida, pour une jeunesse plus responsable. Surtout qu'il est construit sur un schéma parabolique, la situation finale de l'héroïne est pire que l'initiale parce qu'elle fait preuve d'irréflexion. Mais le traitement est trop léger pour toucher le public intéressé.

Rita Diba

Article écrit dans le cadre de l'Atelier de Critiques de Yaoundé - 10ème FENCAF (Festival Écrans Noirs).

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