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Interview Salif Traoré, réalisateur de Faro, la reine des eaux, film du gala d'ouverture
Bulletin Africiné n°04 (FESPACO 2007), du Mardi 27 février 2007
critique
rédigé par Espéra Donouvossi
publié le 15/03/2007

La XXe édition du Festival panafricaine du cinéma FESPACO a véritablement débuté le 24 février 2007 et a eu le mérite d'avoir ouvert la série des projections par un cher d'œuvre malien qui a visiblement ému tout un public resté accroché.
À la fin de la projection, nous nous sommes rapprochés du réalisateur de cette œuvre filmique Faro, la reine des eaux, pour comprendre plus en profondeur ses intention se la technique par laquelle il raconte son histoire.

Africiné : Qu'est-ce que vous avez voulu démontrer à travers les films que nous venons de voir ?

Salif Traoré : Ce film là, j'ai voulu tout simplement véhiculer un message pour encourager les gens à éviter l'exclusion. C'est pour moi le plus important. Quand nous parcourons les rues des capitales africaines, nous voyons des enfants qui dorment sur les arbres, dans les rues, devant les pharmacies ou à côté des mosquées. J'ai voulu faire un film pour dire que ces enfants aussi ont quelque chose à apporter, beaucoup de choses à apporter. Ils sont issus d'un amour, et cet amour est presque rejeté à cause des préjugés. J'invite la réflexion là-dessus ; ce film, je le veux comme un message pour dire que l'Afrique doit se pencher sur ses préjugés. Ça ne doit pas être un handicap pour nous.
C'est vrai que dans tous les pays du monde, il y a des préjugés, il y a des traditions, il y a des coutumes et les gens avancent avec. Il faut que nous aussi nous arrivions à avancer avec ces traditions sans que cela ne soit un handicap pour nous.
Et c'est fondamentalement ce message dans ce film, en essayant d'insister sur le système phallocratique de notre tradition. Pour dire que les femmes sont les braves dans ce pays. Quand on prend le cas du Mali, elles constituent à peu près plus de 60% de la population dans les villages, et c'est dans ces villages, c'est les femmes qui sont plus productives que les hommes. Les hommes n'ont que trois mois de travaux champêtres et après ils sont au pied de l'arbre et c'est les femmes qui font le reste. Et pour moi, le dévouement des femmes, c'est la chose à saluer. On doit beaucoup faire attention, on doit pouvoir les amener à participer à tous les processus de développement, on doit les considérer, elles ont des mots à dire. Si on arrivait à lever l'équivoque et à concevoir que la femme est l'égale de l'homme, je crois qu'on aura beaucoup avancé.

Africiné : En le faisant ainsi et en le disant ainsi, est-ce que vous ne faites pas trop la part belle à la civilisation occidentale au détriment de la nôtre ?

Salif Traoré : Non, parce que je n'ai pas tiré une conclusion. Je n'ai jamais nié cette tradition africaine. Elle est là, elle est bel et bien montrée dans ce film du début jusqu'à la fin sans prendre de partie. Je n'ai jamais dit dans le film qu'il ne faut pas faire avec elle.

Africiné : Mais pourquoi vous l'avez traitée de cette manière dans le film ? Vous y croyez vous aussi ?

Salif Traoré : Ah oui, effectivement j'y crois, comme tout le monde, parce qu'elle est en moi, je suis né dans cette tradition ; c'est ma vie et je vis de ça et dans ça. Et je ne peux pas l'exclure de moi et je dois avancer avec.

Africiné : Quelle place occupe alors cette catégorie de personnes comme l'ivrogne et le fou dans votre discours filmique sur la tradition ?

Salif Traoré : Non, j'ai voulu tout simplement montrer le rythme d'un village où il y a tout. Il y a des bons et des méchants, il y a des pervers et des sérieux qu'on n'écoute pas. Il y a des ambitieux, il y a des cupides dans un village. C'est toujours pareil.

Africiné : Donc vous voulez dire que ces personnages dans le film n'ont pas d'autre rôle plus révélateur ?

Salif Traoré : Oui, mais moi je ne sais pas ce que vous entrevoyez. Moi j'ai réalisé mon film et le mets à la disposition du public qui en juge comme il l'entend.
Si vous pensez qu'il faut être dans état de démence ou d'ivrogne pour penser comme ceux-là ou pour agir comme ceux-là, moi je ne le dis pas et vous êtes libre de concevoir votre propre compréhension. Mais je ne l'ai pas fait à dessein mais juste pour représenter une communauté sociologique.

Africiné : Combien de temps cela vous a pris ?

Salif Traoré : Ce premier scénario, je l'ai écrit en 1995 et ce film est la sixième version. J'ai réalisé d'autres choses avant, parce que ça pouvait me permettre d'avoir de l'argent pour pouvoir le terminer. Mais heureusement pour le terminer, j'ai eu l'appui de mon pays sans lequel je ne pouvais terminer ce film. Les autres partenaires ont été aussi importants. La fin du tournage a eu lieu le 25 février 2006.

G. DONOUVOSSI (Bénin)

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