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La fierté d'être Africain
entretien avec Sylvestre Amoussou (Africa Paradis, Bénin, 2006)
critique
rédigé par Bassirou Niang
publié le 15/03/2007

Une immigration de l'Occident vers l'Afrique : n'est-ce pas une utopie ?

On vit d'utopie ! Moi, je crois en ce que je fais. Et je pense que c'est aux Africains de croire au continent africain. On croit que c'est toujours mieux chez les autres, alors que chez nous, il y a tellement de choses à faire. C'est aux Africains de construire l'Afrique. Nos dirigeants n'ont qu'à arrêter de mettre l'argent dans leurs poches et chercher à aider les enfants d'Afrique. Car quand ils sont à l'extérieur, ces derniers sont humiliés. Quand en France on se déchaîne contre les sans-papiers, aucun dirigeant africain ne dit : "Arrêtez ! Ce sont des humains !" Tous les Africains courent ver Paris ou l'Europe alors qu'il y a une richesse ici. On prend la mer alors que nous sommes riches.

Vous semblez vous adresser davantage aux Occidentaux qu'aux Africains.

Non ! Je parle à tout le monde. Si les responsabilités étaient assumées, l'Afrique ne serait pas dans cette tristesse. Elle serait riche. Il y a une double lecture dans ce film. Je demande aux Européens d'être plus ouverts, plus tolérants. Mais les peuples d'Europe sont aussi victimes que ceux d'Afrique. Les grands de ce monde se réunissent entre eux et ils n'ont rien à faire des citoyens des autres pays, qu'ils soient Africains ou Européens.

Cherchez-vous à combiner provocation et prise de conscience ?

C'est un cri d'alarme que j'ai eu envie de pousser parce que ça me fait mal de voir que toute la planète évolue sauf l'Afrique. Quand on voit les interviews à la télé, les Africains sont toujours en train de dire que ce n'est pas leur faute. On ne va pas continuer à tendre la main alors que le continent est riche. Cela fait bientôt 50 ans qu'on est indépendants. Le peuple africain doit prendre conscience. Ce film est un cri, une révolte. Mes enfants sont métis, moitié européens, moitié africains. Je ne voudrais pas que demain, ils m'interpellent en me demandant pourquoi dans mon continent, c'est toujours la misère alors que chez leur maman, c'est toujours bien !

Vous avez beaucoup joué sur les couleurs.

Oui. Dans mes choix esthétiques, j'ai fait jouer des acteurs blancs et des acteurs noirs. Ensuite, j'ai utilisé la dernière pellicule sortie par Kodak et qui synthétise les couleurs noires pour qu'on puisse être beau à l'image. Parce que généralement, les pellicules sont faites pour les peaux blanches.

Quelle est votre démarche de cinéma ?

Avant ce premier long métrage, j'ai fait six courts. Je suis titulaire d'une licence d'administration économique et sociale. Ensuite, je me suis inscrit dans une école de comédie. Et comme il n'y avait pas les sujets que je souhaitais et de vrais rôles pour les Noirs de France, et que j'avais des sujets qui me tenaient à cœur, j'ai eu envie de commencer en faisant des courts métrages pour dire des choses. Et petit à petit, j'ai appris le métier. J'ai fait des stages et des tournages avec des réalisateurs. Au cinéma, je voudrais être le porte-parole des sans-voix. J'ai envie de crier cette souffrance que j'éprouve dans mon intériorité et de la mettre en images pour dire aux Africains qu'ils soient fiers d'être ce qu'ils sont. On a l'habitude de dire que ce sont des fainéants mais je dis que non ! Quand on veut, on peut. J'ai mis dix ans à faire ce film. C'était difficile, mais j'ai réussi.

Quel sera votre prochain film ?

Je me suis penché sur la manière dont le continent est géré. Ce sera sur la corruption.

propos recueillis par
Bassirou Niang (Sénégal)

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