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Le mystère du drap blanc
R'da, de Mohamed Bensouda.
critique
rédigé par Dieudonné Motchosso Kodolakina
publié le 19/03/2007

Quelque part au Maroc, une femme peine à mettre au monde son petit bébé. Pour dégager ce brouillard, la société recourt à une tradition sacrée : le R'da. Son principe : l'imam désigne quatre enfants d'une école coranique qui vont devoir faire le tour de la ville en portant un drap tout blanc, à l'image de leur candeur et du rêve de cette femme dont les pleurs s'arrêteront une fois l'œuf porté par le drap sera cassé par une des pièces demandées jetées sur la trajectoire des enfants. C'est cette tradition, très présente au Maroc jusqu'aux années 40, que Mohamed Ahed Bensouda choisit de nous faire revivre, le temps tendu d'un court métrage. Lors que sa caméra s'intéresse au visage d'un vieil homme, tout concentré, le spectateur retient davantage son souffle. Sa pièce jetée, l'œuf cassé, voilà la délivrance. Le contexte du film du réalisateur est traditionnel, dépouillé de toute infrastructure médicale, où les croyances religieuses font bonne recette. Ainsi, le cinéaste marocain exploite l'immense trésor qu'apprécie Baudelaire : "l'immense palimpseste de la mémoire".
Mohamed Ahed Bensouda explique son intention artistique, en se fixant comme projet de "restituer la mémoire riche et visuelle de mon pays, de mon continent, tout en offrant du divertissement au public, telle est ma préoccupation dans ce film. Car le cinéma est un art de divertissement."

Nostalgie quand tu nous tiens

Les lumières sont vives, les enfants (acteurs non professionnels) sont le moteur du film. La lumière rappelle celle de l'expressionnisme allemand (contraste et sculpture des volumes par les jeux d'ombre). Quant au décor, il est composé de grandes bâtisses dégradées de style gothique. Le cinéaste reconnaît avoir été très inspiré par le néo-réalisme italien. Les années 40 sont le contexte du film et de l'émergence de ce mouvement cinématographique alpin. Ce qui donne une cohérence à la forme, à l'esthétique de Bensouda.

Film de recherche au niveau de l'image du son, du style et de la narration, il utilise deux narrations en alternance : celle de la femme en travail et celle des enfants qui arpentent les artères de la ville.
Il y a une grande maîtrise technique. L'histoire est marocaine et cependant trouve une résonance universelle : toute la société se mobilise pour soulager la douleur de cette femme. Le moment de délivrance pour la femme constitue un moment fort en suspense. Ce qui contribue à émouvoir le spectateur qui ne décroche pas un seul instant de la trame du film.

Dieudonné Motchosso KODOLAKINA (Togo)

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