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Un cinéma qui a du plomb dans l'aile
GROS PLAN SUR LE CINÉMA AU TOGO
critique
rédigé par Yohanès Akoli
publié le 21/04/2007

La production cinématographique au Togo se trouve dans un état de déliquescence avancé. À l'origine de cette crise qui secoue le cinéma national, le dysfonctionnement de nombre de structures étatiques ayant comme prérogative l'application de la politique cinématographique nationale puis à l'exploitation des salles de cinéma confiée au seul Libanais TABCHOURI. Il y a donc un problème ?

L'histoire du cinéma au Togo, a commencé il y a bien déjà huit décennies. "Les ombres chinoises et "La Lanterne magic" sont les premiers films qui ont permis au public togolais d'être en contact avec les images. Puis les projections payantes ont suivi entre 1927 et 1928, communément appelées "Kpélébè cinéma". C'était du "Cinéma muet" en provenance de la Gold Coast (actuel Ghana). Depuis ce temps, jusqu'aux années 1980, le cinéma a connu un boom sans précédent. Caractérisé par dix sept (17) salles de cinéma qui ont poussé comme des champignons. Les salles les plus fréquentées sont : Opéra, le 24 janvier, Élysée, Capitole, le Rex, le Togo, le Club et Cinéma Concorde. Cet essor du cinéma est poussé à son paroxysme en 1975 par l'avènement ou plutôt l'évènement d'une première tentative du réalisateur DO KOKOU Jacques, auteur du premier court-métrage de 45 minutes sur l'exode rural dénommé Kouami. C'est donc le début de l'aventure cinématographique au Togo.

1993 : une année de rupture

La puissante machine de fabrication de films produit ou co-produit au Togo a reçu un choc terrible. Et pour cause : le Togo accusé de déficit démocratique, a été sevré des fonds de l'Union Européenne et plus particulièrement des fonds d'aide au cinéma du sud offert par l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie. Des fonds dont avaient bénéficié les aînés : Jacques Do KOKOU, Blaise Kilizou ABALO, réalisateur du premier long-métrage Kawilasi primé au FESPACO 1995 avec le Prix spécial du développement humain durable.

Dysfonctionnement des structures étatiques. CINEATO = CNPA / DNC

Le service du cinéma et des Actualités Audiovisuelles (CINEATO), transformé en avril 1995 en en CNPA (Centre National de Promotion Audiovisuelle), se trouve alors plongé dans une profonde léthargie suite à cette absence de fonds. La mission dévolue à ce centre était d'assurer la couverture, la réalisation et la production des émissions de tout genre pour les différentes radios et télévisions. Mais depuis plus de 10 (dix) ans, la seule production qu'on pourra retenir dans les activités de ce centre est le film Yon'Taba du réalisateur Talakaena Batita. Jean-Claude NABÉDE, directeur de la CNPA, explique à cet effet que "le centre d'intérêt des Togolais (gouvernants et gouvernés) a changé. Et c'est d'ailleurs ce qui détermine la non fréquentation des salles de cinéma et ce léger ralentissement dans la production de films nationaux".

Pendant ce temps, à la Direction Nationale de la cinématographie (DNC), dont M. Djénou Ékoué est le Directeur, ce dernier reconnaît que l'application de la politique cinématographique nationale et la réglementation de la production et de l'exploitation cinématographique audiovisuelle fait partie de son cheval de bataille. Mais souligne certes que, "la direction nationale de la cinématographie se trouve confronté à d'énormes difficultés dans l'application de ses prérogatives. Ceci en partie due à l'absence d'un budget alloué par l'État pour soutenir la production de films nationaux et aussi, les fonds du Ministère Français des Affaires Étrangères qui tombent maintenant au compte gouttes".

TABCHOURI : PROPRIÈTAIRE UNIQUE DES SALLES DE CINEMA AU TOGO

De sources bien informées, le Libanais TABCHOURI détiendrait l'exclusivité de l'exploitation des salles de cinéma au Togo. Il serait l'unique propriétaire des deux ou trois salles de cinéma qui fonctionnent encore normalement au Togo. La plupart des salles, sont rachetées ou louées aux Pasteurs c'est-à-dire transformées en "Églises" ou d'autres comme" le Togo" qui porte l'enseigne du siège de la Confédération Africaine de Boxe .Là, l'aspect mercantile du cinéma qui est l'exploitation ; et la distribution de certains films nationaux posent un sérieux problème. Les cinéphiles ont donc déserté les salles de cinéma, au profit du petit écran, tout simplement parce que le grand écran est vide de productions nationales.
M. Sassouvi DOSSEH-ANYRON, Ministre de la Culture, du Tourisme et des Loisirs, se dit donc très inquiet du danger que les images venues d'ailleurs pourront avoir sur les concitoyens et évoque même "une nouvelle colonisation par les images". "Une situation qu'il faut à tout prix maîtriser", souligne t-il.

LES TELEVISIONS NE NOUS AIDENT PAS…

"Nos chaînes de télévisions, surtout la chaîne nationale TVT, ne nous aident pas dans la promotion de nos films" souligne Blaise Kilizou ABALO, réalisateur. Il explique que, après avoir fini le film, il le propose aux chaînes de télé. Ce qui est surprenant dit-il "c'est que, ces chaînes réclament que nous leur payions un droit de diffusion avant la diffusion du film alors qu'au même moment, elles sont prêtes à acheter des feuilletons et des séries brésiliens ou italiens coûtant les yeux de la tête".

UNE AUBE NOUVELLE S'ÉLÉVE SUR LE CINÉMA TOGOLAIS …

Désir du cœur, Fruit de la passion, Vanessa et sosie… sont les trois long-métrages produits par trois jeunes réalisateurs togolais en 2006, respectivement Aimé OBANIKUA, Steven AF et Madjé AYITÉ. Le dernier a eu le prix spécial de l'indépendance à l'issue de la semaine de l'artiste initié en 2006 par le Ministre de la Culture du Tourisme et des Loisirs, Sassouvi Anhyron DOSSEH, parrainé par le Chef de l'État. La semaine de l'artiste, qui sera à sa deuxième édition cette année 2007 (du 07 au 22 avril), vise à encourager tous les acteurs culturels notamment les cinéastes. À l'issu de cette semaine, les meilleurs films recevront des prix et des enveloppes du Président de la République comme récompense à leur dévouement pour le bien-être de la culture au Togo. Par ailleurs, les films Fruit de la passion et Désir du cœur, auront à compétir au FESPCO 2007 à côté de nombreux films africains qui seront présents.

Yohanès AKOLI
(journaliste critique de film au Togo, chargé à l'information et à la communication de l' AJCC- TOGO
(Association des journalistes critiques du cinéma du Togo)

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