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L'horloge invisible d'une réalisation
Le temps d'un film, de Laurence Attali (France / Sénégal)
critique
rédigé par Massamba Mbaye
publié le 22/10/2007

Le temps d'un film, le dernier film documentaire de Laurence Attali est d'un genre très singulier. La réalisatrice citoyenne du monde et sénégalaise d'adoption a choisi cette fois de dévoiler ce qui se passe avant un film, ce qui précède un tournage, ce que les spectateurs n'auraient jamais dû voir.

La face cachée d'un film, pas ses coulisses genre making-off, mais ce qu'un film aurait pu être et qu'il n'est pas totalement. Sur une histoire qui prend forme et qui se confronte à la réalité...
L'inspiration qui est très frivole peut venir de toute circonstance particulière qui titille la bosse sensible d'un réalisateur. Laurence Attali a signé une trilogie qu'elle nomme Les Amours. Elle comprend ses réalisations : Même le vent..., Baobab et Le Déchaussé. C'est ce dernier court-métrage qui est passé au crible mais sous un angle particulier : sa genèse. Au début du Déchaussé était... un concert de Tom Waits au Rex à Paris en 2001. Laurence Attali était en train de monter, Baobab, le deuxième volet de sa trilogie. Le concert de Waits fut une bouffée d'air prise, qu'elle était, dans la spirale quasi mystique des baobabs ; ces arbres typiques qui défient le temps et nous impressionnent aussi bien par leur silhouette imposante que par leurs formes non imposées. Tom Waits fut comme par révélation, un personnage clé de ce film sur le lévirat. Mais il ne fut que le début d'une histoire. Car Tom Waits/ Booz sera au final Cheikh Lô, le talentueux musicien sénégalais. Et le film qui devait initialement se tourner à Venise cherchera site à Paris ; mais c'est finalement à Saint-Louis vieille ville au nord du Sénégal que ses décors seront campés. Ainsi devient un film. Un film qui gomme des lieux avant de se trouver un cadre. Un film qui comme un livre ouvert sur plusieurs personnages, passe sur des personnalités avant de s'arrêter sur des noms. Maylis Guiard-Schmid, Cheikh Lô, Oumou Sy, Claudine Attali, Amadou Doukouré, Mamadou Diongue, (saxophoniste dans l'orchestre des 120 cuivres des Forces Armées du Sénégal)... Pourtant ils étaient nombreux à être passés à la trappe à cause d'un petit détail à un moment précis. Car quand on pétrit le pain, il faut libérer la pâte de ses bulles d'air par un travail méticuleux. Cette image est forte dans ce film qui nous dépeint en 52 minutes ce qu'un film n'est pas et qui revient sur tous ces gens qui joueront dans un autre film genre Le temps d'un film. Le temps d'un film, l'on réalise aussi la formidable capacité de manipulation de ce médium qui, juste avec un bon montage, fait passer, par exemple, les images d'archives sur Tom Waits comme des pièces filmées par la réalisatrice, donne pour vrai une fiction. Et pour rehausser le charme, le dessin un peu animé intégré dans le découpage ajoute une note de fraîcheur qui ne nous distrait pas par rapport au fil levé.

Placé sous le label documentaire de création, Attali nous propose ici une réflexion filmée sur la création. En passant, elle dévoile des clés de son travail avec une générosité certaine. Aussi, comprenons-nous donc que cette réalisation soit un plus pour sa trilogie déjà nommée. Car elle compte l'éditer avec l'Institut national de l'audiovisuel (INA) en Dvd pour la Saint-Valentin prochaine avec probablement un bonus sur Tom Waits, le bluesman désaxé. Bonne idée pour amoureux qui n'ont pas définitivement perdus la tête...

Massamba MBAYE

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