La réalisatrice française Caroline Pochon s'est exercée à un ménage à trois : être la deuxième femme de Massèye Niang et la coépouse de Diodio, la première. Sans donner les raisons de son échec, la réalisatrice qui a participé à la 9ème édition du Festival de film de quartier de Dakar (du 12 au 17 décembre 2007) avec son documentaire La deuxième femme livre sa conception de la polygamie.
Les femmes européennes peuvent-elles vivre la polygamie comme l'acceptent les femmes africaines ? Peuvent-elles être deuxième épouse ou troisième voire même la première avec une co-épouse ? La réponse semble être négative si l'on se fie au film documentaire La deuxième femme de Caroline Pochon (France). Même si elles acceptent le principe pour un
conjoint, leur amour est toujours mis à rude épreuve par les contraintes culturelles et sociologiques. Ces dernières finissent par triompher en fin de compte et les pousse à renoncer sans raison à un amour. Et c'est un pan de la vie de Caroline Pochon.
En donnant sa propre conception de la polygamie, la réalisatrice a mis à l'écran son histoire dans un documentaire de 45 minutes. Balancée entre acceptation et refus, Caroline Pochon ne va pas jusqu'au fond de sa démarche filmique. Car l'on ne sait pas finalement si elle accepte ou pas sa vie de polygamie.
Après un abandon du domicile conjugal pour retourner en France sans avoir donné les raisons d'un tel geste dans le film, la réalisatrice revient sur ses pas pour conter son histoire. Elle interroge son entourage : sa coépouse Diodo, sa belle famille, son ex-mari, etc.
Chacun essaie d'expliquer sa position vis-à-vis de ce mariage. Au début, c'était une histoire d'amour cachée, car son petit copain Massèye était déjà marié à Diodo. Ne pouvant plus supporter cela, Caroline Pochon se marie religieusement à la mosquée à Guédiawaye, dans la banlieue de Dakar, avec Massèye. La Française devient ainsi "La deuxième femme" comme nous l'apprend le titre du film. Mais se faire accepter dans une société différente de la sienne, c'est aussi accepter de vivre les réalités culturelles et sociologiques de cette société. Caroline Pochon par sa caméra, s'est exercée à cette épreuve.
Sans pour autant la réussir, elle a vécu sa vie de femme polygame. D'abord en offrant des cadeaux à la première, comme la veut la tradition africaine (pour lui avoir pris son mari) afin d'éponger sa peine. Et comme la première femme Diodo qui avait du mal au début à accepter cette nouvelle union de son mari, Caroline a droit à ses deux jours de "Aaye" (en langue wolove : chaque femme a son propre tour de ménage, de vie en couple, avec le mari ; cela dure génralement deux jours) chez Massèye. Elle s'est mise aussi au parfum du "Cuuray" (prononcer "Thiouraye" ; l'encens, en wolof) et du "jaljali" (prononcer "dialdiali", ce sont une ceinture de perles autour des reins, en wolof) pour séduire son homme. Outre cela, la réalisatrice s'habille en taille basse et pagne wax et danse au rythme du mbalax.
La société, sa belle famille notamment sa belle mère, ainsi que sa coépouse Diodio avaient finalement accepté sa présence. Cependant, Caroline n'a pas réussi son intégration, vu la tournure du film. Elle ne le dit pas explicitement dans le film, mais l'échec de son mariage semble venir de l'amour qu'elle porte pour Massèye. Un amour qui vit dans une sorte d'enfermement. Car, dans un autre film Nammnala ("J'ai ta nostalgie", en wolof) de 6 minutes, qui sonne comme une suite de La deuxième femme, la réalisatrice donne la réponse en filmant une fenêtre. Veut-elle revenir dans ce mariage à trois par la petite porte, par la fenêtre ? La Française Caroline Pochon semble vivre dans l'impasse.
Fatou Kiné SENE
Article issu de l'atelier Africiné Dakar : 9ème FIFQ (Dakar, 12-17 décembre 2007).
