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"Tous mes films sont une ode musicale"
Moussa Sène Absa, cinéaste sénégalais
critique
rédigé par Charles Ayetan
publié le 27/01/2008

Il était présent à Ouidah, en salle comme dans les rues de cette ville historique du Bénin, avec sa pipe et son inséparable canne. Ceux qui l'ont déjà rencontré, peuvent facilement reconnaître le Sénégalais Moussa Sène Absa, réalisateur du film Teranga Blues au sujet duquel nous l'avons interrogé.

Pourquoi Teranga Blues ?
Teranga Blues est une urgence. J'ai vu les jeunes de mon continent se suicider dans la mer, j'ai vu les jeunes de mon continent expulsés d'Europe comme de vulgaires rien du tout, j'ai vu l'humiliation de la jeunesse de ma race sur tous les continents. Teranga Blues est donc un cri contre ces injustices…

Qu'avez-vous voulu montrer par ce film ?
Par ce film, j'ai essayé de montrer le rêve d'un jeune musicien talentueux mais en "situation illégale" qui un jour est expulsé. C'est quoi le rêve d'un jeune immigré en Europe : avoir beaucoup d'argent pour envoyer à la famille, construire une maison pour sa maman, avoir une belle fille, une belle voiture et préserver l'honneur de sa famille…
J'ai voulu jeter un regard sur ce rêve de jeunesse, mais un regard contre toute attente. Ainsi, au lieu de ramener ce jeune à Dakar les mains vides et l'humilier, j'ai décidé de lui donner tout ce dont il rêvait.

À considérer ce choix et la vie du jeune Madiké, valait-il la peine de lui donner cette chance ?
Chaque rêve a un prix. Quand Dick vient avec sa belle Mercedes, sa mallette noir et des billets de banque, personne ne sait où il trouve cet argent. Il vit un mensonge qui le ronge jusqu'à sa mort malgré les prières des femmes. Il paye sa mort.

Tout le film est nourri de chants et de poésies, êtes-vous poète ?
J'aime écrire. Le cinéma, c'est aussi cela. J'écris tous les matins. Dans le story telling (la manière de raconter l'histoire), j'essaie toujours d'amener l'âme de ma culture. Le cinéma que j'aime, c'est le cinéma qui magnifie, ennoblit, grandit et nous rend humain. J'adore la musique et tous mes films sont une ode musicale.

Comment parvenez-vous à traiter de la poésie dans vos films ?
Ce qui peut étonner est que j'écris mes scenarii toujours avec la musique. J'intègre la musique dans la narration, la musique devient un personnage et non pas un bouche-trou. La musique est vivante, visible et raconte l'histoire d'une autre manière, à un autre niveau. Elle me crée des cercles concentriques dans le film.

Comment êtes-vous venu au cinéma ?
Dès mon jeune âge, j'étais émerveillé par le cinéma. J'allais au cinéma tous les jours. L'anecdote est qu'un jour, j'ai vendu ma chemise pour avoir accès à une salle de cinéma. J'avais 12 ans. Tous mes amis étaient en salle et moi je n'avais rien en poche. J'ai dû donner ma chemise en gage aux trafiquants de tickets. Cette scène se trouve dans mon film Ça Twiste à Popenguine. Le cinéma, c'était mon espace de rêve…

À vous entendre, vous n'êtes pas esclave de distinctions…
Je n'y pense même pas. Je prends plaisir à discuter avec les gens qui ont vu mon film. Leur joie fait mon bonheur : c'est là mon prix. Mon prix, c'est le regard du spectateur quand il sort de mon film.

Propos recueillis par Charles Ayetan (Togo)

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