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Vendredi noir, de Djingarey Maïga (Niger)
Entre pauvreté et malheur, le Niger vit au quotidien
critique
rédigé par Espéra Donouvossi
publié le 09/07/2008

Si on accepte que ce film est une œuvre fictive, alors il faut aussi dire que le cinéma c'est le dessin du quotidien en Afrique. Le film n'est ni un reportage ni un documentaire, mais il reprend la quotidienneté du Niger qu'il peint et dénonce dans un langage bien clair. Les silences de résignation, les signes et gestes que la réalisatrice a choisi de monter et de nous montrer expriment les moments de pauvreté dont sont victimes les Nigériens. Mais en haut, les grands détournements se font, la corruption s'est érigée en une règle et seuls les grands voleurs ont droit de cité. Faute de 1000 Francs demandés par l'institutrice, la jeune fille n'a pu aller à l'école et à cause du non paiement de l'ordonnance, la sœur aînée décéde alors que le jeune garçon doit faire des kilomètres à pieds pour atteindre son collège où il doit aller évidemment en retard presque tous les jours. Un peu plus loin, ce sont les hôpitaux qui manquent de nécessaire pour les premiers soins. Mais à coté, il y a les belles villas, les belles voitures, les belles femmes et les hommes de culte qui n'ont rien à faire de la misère des autres. "C'est cela le Niger d'aujourd'hui" comme le fait dire Djingarey Maïga au médecin de l'hôpital. Au Niger, la prison est pour les voleurs de poulets, d'assiettes.Mais les meurtres, les pilleurs de l'économie, les corrompus, les despotes sont libres comme de l'air et se moquent des innocents que l'injustice et l'impunité enfoncent dans la pauvreté et la misère. Tout ceci révolte et le film ne pas manque de montrer des scènes de révoltes. Par exemple le dialogue de protagonistes et le soulèvement des étudiants.

Pour répondre à Olivier Barlet qui dit que "ce film manque tellement de moyens qu'il ne répond en rien aux critères d'un cinéma international", je dirai que le film qui traite de pauvreté et dénonce la politique, l'injustice et l'impunité ne doit pas avoir de grands moyens au risque de perdre la partie humaniste de son film car la pauvreté c'est l'absence de moyens. Même si le film ne répond en rien à un cinéma international, il a tout au moins le mérite d'oser dire ce qui se passe réellement dans les sociétés africaines. Assistée dans la réalisation par l'incontournable Fanta Régina Nacro, Djingarey Maïga peint en noir l'avenir des jeunes et des femmes qui sont les couches défavorables de la société. Vendredi noir est une œuvre qui diagnostique le mal et permet de le traiter.

Avec dans sa filmographie, plus de 15 films dont 5 longs métrages, Djingarey Maïga est un autodidacte qui est arrivé au cinéma à la faveur d'un rôle que lui a proposé Mustapha Alassane dans le film Le retour d'un aventurier en 1966. C'est pour lui, la réalisation d'un rêve.

Après sa première fiction L'étoile noire réalisée en 1975, Nuage noir en 1979, Aube Noire en 1983, Miroir noir en 1997 et puis Vendredi noir en 1999, Djingarey Maïga opte pour la couleur noire pour dessiner le chaos dans lequel sombre le Niger ou toute l'Afrique. Le noir qui symbolise le deuil et le malheur en Afrique. Pour lui au Niger, rien n'est clair. Son dernier film en préparation, Quatrième nuit noire qui sort bientôt, atteste la conviction du réalisateur qui voit les hommes vivre et les dessine tels qu'ils sont.

Espéra G. DONOUVOSSI

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