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Une jeunesse israélienne (Vasermil)
Des Africains en Israël
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 18/08/2009
Michel Amarger
Michel Amarger

LM Fiction de Mushon Salmona, Israël, 2008
Sortie France : 26 août 2009

Le cinéma israélien a une longue histoire, souvent puisée dans les conflits, les guerres qui frappent les réalisateurs. La nouvelle génération semble pourtant diversifier ses sujets et s'ouvrir à la présence d'autres communautés. L'immigration occupe une place notable dans la composition des couches sociales de la société israélienne actuelle. Depuis peu, des fictions témoignent de la présence des Africains exilés. En 2008, deux premiers films abordent diversement la condition des Ethiopiens. Dans Zion et son frère de Eran Merav, un adolescent africain devient le point de discorde entre deux frères israéliens. La complicité de Zion et Meir est brisée quand un voisin éthiopien semble avoir volé les chaussures de Zion. Pour les récupérer, Meir bouscule le garçon qui disparaît sous un train. L'accident oppose les frères, hantés par leur secret, jusqu'à ce que Zion décide de s'affirmer. L'histoire située dans le port d'Haïfa, pointe l'existence de la communauté éthiopienne comme un sujet perturbant. Même si l'approche du réalisateur s'exerce sans manichéisme.

Dans Une jeunesse israélienne de Mushon Salmona, la question du regard sur les Ethiopiens vivant en Israël est plus fouillée. L'action tourne autour de trois jeunes, issus de communautés étrangères, à Beer Sheva, au sud d'Israël. Shlomi d'origine nord africaine, livre des pizzas pour un patron profiteur. Dima, arrivé de Russie, travaille pour des dealers. Adiel, éthiopien, cultive les valeurs rastas en exerçant ses talents au foot. Tous ont du mal à s'insérer dans la société israélienne. Rebelles et agités, ils n'acceptent pas la différence des autres. La nécessité de s'unir dans l'équipe de foot de l'école, pour éviter un renvoi, les pousse à entretenir une relation amicale imprévisible. Mais leur cohésion est mise en péril par le passé et l'entourage de chacun. Le film souligne frontalement les mélanges de la société. "A travers Une jeunesse israélienne, j'ai aussi voulu aborder la question de l'immigration", reconnaît le réalisateur.

"La première génération et ses cicatrices perdurent généralement sur les deuxièmes et troisièmes générations", observe t'il. "Certes, la violence et les conflits inter ethniques, ne sont pas spécifiques à Beer Sheva. J'ai vécu à Londres où cette situation existe." Edifié par ce séjour quand il se forme au cinéma, Mushon Salmona tourne un court métrage, Father's Day, en 1994. Dix ans plus tard, il rentre en Israël et prépare Une jeunesse israélienne. "J'ai écrit le scénario trois ans après le tournage d'un documentaire sur la jeunesse de Beer Sheva. La rencontre avec cette réalité contemporaine de la jeunesse marginalisée, socialement et géographiquement, m'a fait mesurer les différences mais surtout les similitudes entre leur vie d'aujourd'hui et mon enfance passée au même endroit dans les années 70", raconte-t-il. "Le même environnement multiculturel, la perte précoce de l'innocence, la réalité économique et l'absence d'espoir m'ont incité à écrire Une jeunesse israélienne. J'ai voulu mêler les histoires de la nouvelle immigration, des anciens habitants du quartier et ces fameux récits de football de mon enfance."

En immergeant sa caméra dans le sillage de ses héros, joués par des acteurs non professionnels convaincants, Mushon Salmona éclaire de manière significative la condition des Ethiopiens en Israël. Alors qu'Adiel affirme son goût des valeurs rastas, sa mère le pousse à fréquenter l'école juive. Et quand son petit frère, au soleil couchant dans une colline, se sent "comme en Afrique", Adiel lui remet les pieds sur terre en rétorquant qu'il est né là, et qu'il n'est jamais allé en Afrique. En soulignant cette fracture avec l'Ethiopie, le garçon essuie pourtant, au cours du film, les insultes racistes des jeunes des autres communautés pour qui il reste "L'Ethiopien". Une dénomination qui le marginalise alors que, comme le rappelle Mushon Salmona : "Dans les années 70, on apprenait aux jeunes gens qu'ils composaient un "melting-pot" ; ainsi nous allions créer une sorte de nouvelle société israélienne où il serait agréable de vivre tous ensemble." Le résultat est manifestement remis en question par un nouveau courant de cinéastes.

Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France)

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