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Number One
L'homme et son sort au Maroc
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 19/09/2009
Michel Amarger
Michel Amarger
Zakia Tahiri
Zakia Tahiri
Number One
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Number One
Number One
Aziz Saâdallah
Aziz Saâdallah
Khadija Assad
Khadija Assad

LM Fiction de Zakia Tahiri, Maroc, 2008
Sortie France : 23 septembre 2009

La vigueur du cinéma marocain est encore peu perceptible sur les écrans européens. Malgré l'augmentation sensible de la production, les films qui n'ont pas de coproducteurs en Occident ont du mal à y trouver un espace de diffusion. La sortie française de Number One de Zakia Tahiri rappelle que la comédie populaire tient sa place dans les salles marocaines. Le public a suivi avec passion, en les discutant, les péripéties de Aziz, un directeur d'entreprise autoritaire, victime d'un sort qui le gagne subitement à la cause féministe. "Number One est né du désir d'écrire une fable, une comédie populaire, douce-amère, pour dédramatiser un quotidien difficile", affirme d'emblée Zakia Tahiri.

Son héros, Aziz, dirige d'une main de fer, une usine de confection qui emploie une cinquantaine de femmes. La mondialisation augmente la concurrence et rend l'accès aux marchés difficile. Lorsqu'une cliente exigeante débarque d'Europe pour voir si l'offre de l'entreprise est concurrentielle, Aziz est contraint de faire bonne figure, de remiser le machisme dont il use avec ses employées et au sein même de son foyer. Sa transformation en gentleman séducteur culmine lors d'une soirée au restaurant où il déploie ses charmes pour s'attirer les faveurs professionnelles de sa cliente. Une révélation pour l'épouse, invitée au repas qui la sort de son rang domestique à la maison.

Pour prolonger cet instant de grâce, elle cède aux conseils d'une amie qui préconise de jeter un sort au mari afin de l'amadouer à plein temps. La contribution d'une guérisseuse se révèle plus efficace que prévu. Aziz devient un modèle de galanterie, prônant le féminisme jusque dans l'usine où les ouvrières peuvent enfin se lâcher. Emporté par ses élans, au grand dam de ses copains méprisants, le mari repenti profite d'un nouveau sort pour aspirer à une autre vie conjugale. "Son histoire est celle d'un pays en pleine mutation", commente Zakia Tahiri. "Tout comme le Maroc, Aziz va vivre les contradictions d'un pays musulman où les lois changent, les traditions s'effritent, et les esprits s'éveillent."

Les réformes du gouvernement sur le code de la famille et une loi de base, la "Moudawana", en 2004, servent de trame au fond social qui étaye Number One. "Le pouvoir est allé plus vite que la société civile où persistent traditions et croyances", observe Zakia Tahiri qui développe sa comédie colorée et énergique autour des attitudes excessives du mari. L'enthousiasme des acteurs compense quelques rudesses de montage. Aziz Saadallah, vétéran du théâtre marocain, héros de Badis et d'une kyrielle de téléfilms populaires, campe avec justesse le machiste retourné. Sa femme Khadija Assad, assure en secrétaire réprimée. Nezha Rahil, égérie des films de Faouzi Bensaidi, joue l'épouse qui s'émancipe.

Leurs échanges vifs et souvent cocasses dans les rues de Casablanca battent en brèche les idées reçues sur la société marocaine. Pour son premier long-métrage en solo, tourné dans le pays de son enfance, Zakia Tahiri emploie un humour tonique, loin du ton des rôles plutôt graves qui l'ont fait connaître en tant que comédienne dans des fictions françaises. Depuis sa rencontre avec Ahmed Bouchaala avec qui elle a signé Origine Contrôlée, 2001, et des téléfilms en France, Zakia Tahiri s'investit à fond dans ses productions. AvecNumber One, financé à 98 % par le Maroc avec le concours de sponsors privés, elle hisse la comédie au hit parade des films indépendants.

Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France)

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