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Lancement du 58ème Festival international du film de Mannheim-Heidelberg (Allemagne)
critique
rédigé par Télesphore Mba Bizo
publié le 09/11/2009
Télesphore MBA BIZO
Télesphore MBA BIZO
Festival de Mannheim 2009
Festival de Mannheim 2009

La 58è édition du Festival international du film de Mannheim-Heidelberg se déroule depuis le 5 novembre 2009 en Allemagne. Le chapiteau de Heidelberg a abrité la cérémonie officielle de lancement où le film d'ouverture a retenu toutes les attentions.

Les trois mille spectateurs du chapiteau de Heidelberg applaudissent le générique de fin. L'apparition du nom du moindre des acteurs à l'écran s'accompagne d'une salve encore plus nourrie. La salle s'embrase quand les vedettes du film inaugural du festival rentrent sur scène. Pourtant, le thermomètre allemand affiche 5 degrés en cette nocturne.

Geoffrey Enthoven vient de convaincre. À nouveau. Le public allemand est acquis à la cause du "récidiviste" pour la seconde fois en trois ans. Son succès populaire initial est le deuxième long-métrage intitulé The Only One. C'est le lauréat du Grand prix Mannhein-Heidelberg 2006. Dans ledit film comme dans le plus récent, le problème central est le vieillissement. L'héroïne de The Only One est hectagénaire. Son homologue de The Over The Hill Band est sa cadette d'à peine dix ans. C'est une heptagénaire.

D'aucuns peuvent y voir une stagnation thématique. En d'autres termes, il s'agirait de regretter la répétition du message de restitution de la dignité perdue aux personnes du troisième âge. D'autres observateurs sont endroit d'y trouver une sorte de constance consciente et structurante du projet de repersonnalisation des "vieux" dans une Europe post-industrielle, donc déshumanisante. Cette œuvre de réhabilitation de l'image perçue des anciens devient, par conséquent, un programme. Un programme de production(s). Il s'étale sur le temps. Ce sont déjà deux films. L'avenir n'exclut donc pas un troisième "épisode" toujours fixé sur le vieillissement. En effet, les distinctions accourent déjà. The Over The Hill Band remporte les honneurs au 28ème Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue en 2008. Le public y décerne au film belge le Grand Prix Hydro-Québec.

Certes, les deux films engueulent le vieux continent. Il est fautif d'être devenu impersonnel. Cependant, le nouveau film est loin d'être la copie conforme de l'ancien. La ligne de démarcation entre les deux se sédimente sur la modification de l'approche genre. Si le personnage opposant à la "mémé" dans le film primé est sa fille, le fils aîné devient le bourreau de la veuve Claire dans la livraison récente. L'époux de l'héroïne trouve la mort dans un accident de la circulation. Les deux personnages sont en route à destination de leur domicile en fin d'après-midi. Le traumatisme de la mort subite affole la comédienne Mari Lou Merlans. La consommation du veuvage la dirige vers ses anciennes amours : la musique. Sa dernière scène date de cinquante ans. Elle a alors la majorité civile et judiciaire. Il faut retrouver les co-chanteuses d'antan. Ferme, le fils aîné s'oppose. Il est du type "Monsieur propre, saine éducation et industriel prospère". C'est le gendre rêvé et l'héritier parfait : le portrait craché du défunt père. Le grand frère représente aux yeux de la mère l'image refoulable de l'autorité dirigiste. Le benjamin, Sid, quant à lui, approuve l'idée de la formation d'un nouveau groupe musical à une condition. La mère doit, sans exclusive, puiser dans le répertoire du fils. L'intéressé est lui-même chanteur de Hip Hop. L'authentique fou de la famille. Il devient l'interface et le répétiteur du groupe des trois grands-mères.
À l'image de la littérature africaine, la vérité vient de la bouche du fou. En effet, Sid réussit l'opération de reconversion de sa mère en une beauté fière de ses charmes des dix-huit ans. Il faudrait la voir gambader d'un podium à l'autre. Elle parvient même à faire la découverte d'une nouvelle âme sœur au soir de ses jours sur terre.

Le mérite du film est la direction d'acteur. Le réalisateur met trois croulantes sous les projecteurs. Personnes et personnages ne forment plus qu'une seule réalité. La réserve, la distance et la discrétion, dignes des âges murs, disparaissent. Elles cèdent le territoire à la débauche d'énergie, à la vitesse. Les séances de répétition les dévisagent dans des missions quasi-impossibles pour leur âge. Quelle ne serait la surprise de la chanteuse électrique du début de la décennie 90 Techtotronic de découvrir le "G3" sur les planches. En effet, les trois retraîtables reprennent sa chorégraphie dans le titre Pump Up The Jam. La cadence et le pas de danse des "jambes fatiguées" sont tout aussi énergiques et organisés. Il est impossible de les piéger au sujet de la maîtrise des paroles de ladite chanson à succès. La correspondance est nette entre les contorsions labiales et le texte :
Awa a play touesday get debou and volt tonignt net too nigndai

Awa a play touesday get debou and volt tonignt net too nigndai


Oh pump up the jam

Pump the up
Waya fil a stop ir

And the jimis pump the up and grindre stop ir

Pump the up

On a wair no

Yes a spori

Go one and the still then

Sicle then and the four then

You saret you sar then


Des respirations d'ordre comique ou humoristique aèrent la narration. Durant l'oraison funèbre des obsèques du père, le téléphone de Sid sonne. Il dit être en pleine réunion sans la moindre gêne face au regard désapprobateur du prêtre et de la communauté éplorée. On ne peut qu'en rire aux éclats. On se tient carrément les cotes lorsque le même enfant démarre la voiture en trombe, dans un bruit assourdissant avant la fin réelle de la cérémonie d'inhumation. Nombre d'effets gags donnent un bol d'air au récit presque toutes les cinq minutes. À titre personnel, la fonction du rire est justifiable ici. En effet, la vieillesse est une obsession. Elle fait peur. Elle rapproche de la mort. Même si chacun veut atteindre le paradis, nul ne tient à mourir. Le deuil est un thème grave et sinistre. Pour l'aborder, il faut y inclure un minimum de gaieté et, de la sorte, entretenir la joie de vivre. Cette formule accroche.

S'il y a à redire, c'est au sujet de la pertinence de la caméra subjective. Son usage est abusif dans divers gros plans. Les séquences de l'accident, de la querelle avec le fils aîné ou encore de la bagarre entre les deux orphelins perturbent l'iris. Aucune information supplémentaire n'y est vraiment fournie afin de servir et valoir ce que de droit.

Télesphore Mba Bizo, envoyé spécial à Heidelberg, Allemagne.

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