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Ouverture du 25e Fifak (Kélibia 2010)
L'édition du défi
critique
rédigé par Samira Dami
publié le 30/09/2010
Adel ABID, Directeur du FIFAK
Adel ABID, Directeur du FIFAK
Pierre LABA
Pierre LABA

Nous sommes heureux d'annoncer que le Festival international du film amateur de Kélibia (Fifak) sera désormais annuel. Cette 25e session est donc une date importante dans l'histoire de cette manifestation, l'une des plus anciennes et des plus prestigieuses d'Afrique et du monde arabe, qui doit s'ouvrir chaque année sur les meilleures productions du cinéma amateur dans le monde. Et c'est avec l'aide du ministère de la Culture que pareille option s'est concrétisée et que le défi a été relevé". C'est ce qu'a déclaré en substance le directeur du Fifak, M. Adel Abid, lors de la soirée d'ouverture samedi dernier de cette "édition du défi" qui se déroule actuellement du 10 au 17 juillet avec, au menu, 90 films entre compétition internationale (43 films), nationale (16 films) et d'écoles (13 films). Cela, outre l'hommage au cinéma argentin (10 films), ainsi que des rencontres avec des cinéastes amateurs et professionnels de divers horizons dont notamment le cinéaste argentin Pablo Cesar, ami du Fifak, la documentariste française Vanessa Stojilkovic, le cinéaste et dramaturge irakien Kassem Hawal, et également, notre acteur national, Fethi Heddaoui membre du jury international de cette 25e édition. Voilà qui promet certes.

Quelques déceptions…

Mais il faut le dire, le menu de la soirée du coup d'envoi de cette édition n'a pas été, lui, des plus consistants. Car avant le film d'ouverture, les amoureux du cinéma amateur et le public de Kélibia venu en grand nombre au théâtre de plein air ont dû endurer pendant près d'une heure le numéro de chant très amateur d'une chanteuse en herbe interprétant, comme le veut l'air du temps, un chapelet de chansons libanaises générant l'ennui le plus total. Comme si le cinéma ne se suffisait pas à lui-même.
Allons donc ! Le Fifak, que l'on sache, est un festival de cinéma et le public est venu non pas écouter de mauvais clônes de Fairouz and Co, mais voir tout bonnement des films.

Déception hélas (!) également du côté du film d'ouverture : Mariage à trois visages de l'Ivoirien Pierre Laba qui signe là son 4e long métrage après Coupé décalé, Danger permanent et Le gaucher d'Abidjan.
Mariage à trois visages, qui se veut un jeu de mots à propos de ce sésame tant convoité par les Africains qu'est le visa, narre le bouleversement que connaît le quotidien de Amoin, villageoise d'un coin perdu de Bobo-Dioulasso, quand son cousin, Zass, photographe ambulant, rêve de partir en Europe, lui arrange grâce à Internet un mariage avec un homme blanc. S'ensuivent à l'arrivée de ce dernier une montagne de maladresses et de ratés de la part d'Amoin, au grand dam de Zass.

mariages à 3 visages from Africiné www.africine.org on Vimeo.



Filmé de manière primaire et très gauche, ce long métrage décline à tout-va les préjugés ironiques des plus exotiques sur les paysans et villageois africains représentés notamment par Amoin qu'on voit, pour ne citer que cet exemple, une fois mariée à l'homme blanc et partie en France, ignorer la chambre à coucher de sa nouvelle demeure pour dormir sur le carrelage froid de la salle de bains (sic). Comme si, de sa vie, elle n'avait jamais vu un lit.
Comment oser, en tant que réalisateur africain [Martiniquais, Pierre Laba vit depuis 1999 en Côte d'Ivoire, Ndlr], galvauder et conforter de tels préjugés et tourner en dérision la prétendue "naïveté primitive" de cette paysanne ivoirienne ? Vouloir faire rire au détriment d'un personnage, d'une classe ou encore filmer son propre peuple avec un regard notoirement occidental est, pour le moins, dépassé, voire ridicule !

Mariage à trois visages était-il le film le plus approprié et le plus idoine pour ouvrir ce 25e Fifak ? Absolument pas. Ainsi, en attendant de passer aux choses plus sérieuses, soit la projection des films en compétition et en hommage au cinéma argentin, espérons que le public de Kélibia goûtera au vrai plaisir du bon cinéma amateur, d'ici et d'ailleurs.

Samira DAMI

Article paru dans le journal La Presse de Tunisie le 13-07-2010

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