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Ouverture de la 9ème édition de Quintessence, au Bénin
146 films à Ouidah, au pays du vodoun
critique
rédigé par Médard Gandonou
publié le 13/01/2011
Quintessence 2011, Ouidah
Quintessence 2011, Ouidah

Le Festival International de Film de Ouidah - Quintessence lance la course pour le Python Royal. Pour la 9ème fois, la ville de Ouidah, célèbre côte ouest africaine des esclaves, ville de vodoun, grand pôle culturel du Bénin, s'ouvre au 7ème art. 146 films dans une ambiance carnavalesque, en parfaite symbiose avec Ouidah du 10 janvier, fête nationale de vodou ; Ouidah des Oros divinités des "nuits interdites", Ouidah de l'art…

Chaque année nous éloigne de Ouidah 92, un rassemblement planétaire de la diaspora noire autour de vodoun. Mais difficile d'évoquer cette ville située à 42 km à l'ouest de la capitale économique Cotonou, sur la côte atlantique, dans le Golfe de Guinée, sans en avoir un petit souvenir. Dans les mémoires, les couleurs arc-en-ciel des adeptes des divinités Dan (Air), Xakpata (Terre), Tohossou (Eau) et les masques Egoun (ancêtres ressuscités) etc... sont encore vivaces ; du Temple sacré des Pythons à la place Zomahi. Les nombreuses foules multiraciales envahissent les rues du Fort français à la "Porte de Non Retour", terminal de "La Route de l'Esclave". C'est une funeste route historique qui va de la "Place du marché aux esclaves" en passant par "Le Mémorial" implanté sur une fosse commune des "invendus irrécupérables" de bras valides déportés. Plus qu'un beau et glorieux passé !

Depuis, Ouidah ville festivalière, a sombré… mais résiste. Repliée sur sa richesse culturelle endogène, elle renaît progressivement de ses cendres. Les reliques de l'esclavage, le 10 janvier consacré journée nationale de vodoun, le Festival International de Film de Ouidah et le festival de danse Agogo, donnent aux houédas (habitants de Ouidah) nostalgiques de Ouidah 92, des raisons d'espérer.

Les touristes qui prennent départ de la ville aéroportuaire de Cotonou savent que Ouidah est une destination culturelle de rêve dans ce mois. Le cinéma africain y élit sa capitale et va chaque 10 janvier à la rencontre des festivités de la journée de vodoun.

C'est l'expression de la vitalité de la culture et Quintessence qui reverse ses cinéastes, invités et festivaliers aux sites de culte vodoun ce jour, en est conscient. Lui qui, pour la circonstance, interrompt tous ses programmes de projections de films à 21 heures pour le règne nocturne sans partage des Oros, divinités des nuits interdites aux femmes et hommes non initiés.
Cette année, le festival Agogo - qui magnifie la danse béninoise dans toute sa diversité - en ajoute à ce melting-pot culturel.

Du 7 au 11 janvier 2011, le Festival International de Film de Ouidah réaffirme pour la neuvième fois la présence du cinéma à cette messe culturelle de Ouidah.
146 films issus de 20 pays représentant les 5 continents sont projetés. 17 longs métrages, 13 documentaires de format TV. 94 films sont en compétition pour le "Python Royal", Grand Prix du Festival pour le long métrage, "Le Python à tête Noire" dédié au scénario, "Le Python Papou" au documentaire, "Le Python Pygmée" au court métrage et aux jeunes, "Le Python Tapis" consacré au film d'animation et "Le Python de Children" au réalisateur de long métrage distingué par le public.

Du financement du festival à la programmation, il y a une présence remarquable de la France. 30 films soutenus par CulturesFrance (structure désormais rebaptisée Institut Français) sont répartis dans diverses catégories.
Absent pour le Python royal (long métrage), le Bénin se relance avec le court métrage. "Irho, la richesse perdue" de Armel Gbèyihin et "Braves de la route de l'esclave" de Arcade Assogba sont en lice et doivent concourir avec des films tels Camille et Jamila de la Marocaine Souad Amidou, La brûlure (Harga) de la Tunisienne Leila Chaïbi.

Quintessence 2011 rend aussi hommage à Sotigui Kouyaté en présence de sa veuve Esther Kouyaté-Marty. Il porte aussi un regard croisé sur les œuvres de Jean Rouch à travers des rencontres internationales ethnologie et cinéma. C'est une rétrospective sur un ethnologue qui, caméra à l'épaule, montre une nouvelle image de l'Africain et apporte un sang neuf à la technique cinématographique mondiale.

Il y a une grande richesse de la programmation du festival qui contraste cependant avec les difficultés organisationnelles manifestes. Mais ce que l'événement a perdu en ampleur et en solennité, il l'a sans doute gagné en l'engagement et la conviction de ses organisateurs.
Quintessence cette année perd ses somptueux locaux de l'Institut de Recherche en santé publique pour une paillote. Les artistes par contre, voient plutôt un décor plastique adapté à l'art mieux que les airs conditionnés. C'est là un regard philosophique d'artistes qui dissimule mal les vicissitudes du Festival.
À la vue de ces quelques camions aux couleurs de Quintessence, en panne et immobilisés dans la rue Quintessence, les festivaliers des première éditions de Quintessence, deviennent nostalgiques. Jadis mobiles à travers la ville tels des hirondelles annonçant le printemps, ces camions ne sont aujourd'hui plus que de simples objets décoratifs. Jean, initiateur et Délégué général du festival ne s'en émeut guère. Pas plus que d'ailleurs ses jeunes collaborateurs Arcade Assogba et Adrien Castello qui font les derniers réglages sur le matériel de projection de film ou courent pour le badge d'un invité.

On se rend bien compte que de Quintessence, il ne reste que la foi de Jean Odoutan et de sa jeune équipe d'organisateurs. Ceux-ci sont convaincus que le défi de Quintessence reste toujours actuel. Il y a plus maintenant 9 ans que Jean Odoutan, lors du tournage de son film "Barbecue Pejo" au Bénin, a découvert une terre "analphabète" du cinéma et s'en était indigné. Et depuis, Ouidah, la ville de vodoun, a appris à connaître le langage du cinéma. Cette année avec 146 films, elle a encore de la matière pour aiguiser son sens du 7ème art. Et son avis est attendu pour le Python Children, le prix du public.

Médard GANDONOU

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