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"Le cinéma pour moi est un amour fou", Youssouf Djaoro, acteur tchadien.
Entretien de Youssouf Djaoro, avec Hala El Maoui
critique
rédigé par Hala El Maoui
publié le 08/02/2011
Youssouf Djaoro (Adam) dans Un homme qui crie
Youssouf Djaoro (Adam) dans Un homme qui crie
Dubai 2010
Dubai 2010
Dubai 2010
Dubai 2010
Mahamat-Saleh Haroun entouré de Diouc Koma et Youssouf Djaoro, sur la Croisette, Cannes 2010
Mahamat-Saleh Haroun entouré de Diouc Koma et Youssouf Djaoro, sur la Croisette, Cannes 2010
Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun, Douc Kioma et Emil Abossolo M'Bo lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun, Douc Kioma et Emil Abossolo M'Bo lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Olivier Barlet (modérateur), Marie-Hélène Dozo (monteuse), Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun, Douc Kioma et Emil Abossolo M'Bo lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Olivier Barlet (modérateur), Marie-Hélène Dozo (monteuse), Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun, Douc Kioma et Emil Abossolo M'Bo lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun et Douc Kioma lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Youssouf Djaoro, Mahamat-Saleh Haroun et Douc Kioma lors de la conférence de presse de "Un homme qui crie", Cannes 2010
Youssouf DJAORO (Nassara ; en rouge) et Ali Bacha BARKAÏ (Atim), dans Daratt de Mahamat-Saleh Haroun
Youssouf DJAORO (Nassara ; en rouge) et Ali Bacha BARKAÏ (Atim), dans Daratt de Mahamat-Saleh Haroun
Youssouf Djaoro (Adam) et Djénéba Koné (Djénéba) dans Un homme qui crie
Youssouf Djaoro (Adam) et Djénéba Koné (Djénéba) dans Un homme qui crie

"Un Homme qui crie" (lauréat du Prix spécial du Jury au Festival de Cannes 2010) du réalisateur Tchadien Mahamet Saleh Haroun a remporté les trois plus importants prix du Festival International du Film de Dubai (DIFF 12-19 Décembre) dans la compétition Muhr Asie-Afrique pour les longs métrages de fiction. Youssouf Djaoro, l'acteur principal et le seul représentant du film au festival est monté sur scène trois fois pour recevoir les prix du meilleur montage, meilleur film décerné au réalisateur Haroun et finalement le prix de meilleur acteur.
"Un Homme qui crie" [sélectionné au FESPACO 2011, ndlr] est la deuxième collaboration entre Youssouf Djaoro et Mahamet Saleh Haroun. En effet après "Daratt" (Saison sèche) qui a remporté le Lion d'Argent à Venise 2008 et le Tanit de Bronze à Carthage 2008, le cinéma tchadien est à la une de la presse mondiale. Youssouf Djaoro nous a accordé cet entretien après la cérémonie de clôture du DIFF.

* Vous avez joué avec Haroun dans ses plus importants films. Comment cette rencontre a-t-elle eu lieu ?

Youssouf Djaoro :
Moi et Haroun nous sommes de la même région, mais on ne se connaissait pas. Il m'a découvert à travers un film de Serge Coelo "Dar Essalam". Quand il est venu au Tchad, il m'a proposé "Darrat" et nous travaillons ensemble depuis. J'ai tenu le rôle principal dans son court métrage "Expectations" ensuite "Un Homme qui crie".
Il écrit de merveilleux scénarios. C'est un grand réalisateur et je n'éprouve aucune difficulté avec lui sur le lieu de tournage. De toutes les manières, le cinéma pour moi est un amour fou.

* Dans "Darrat" et "Un Homme qui crie", il est question de désert. Est-ce que le désert est un thème universellement attrayant ?

Y. D. :
La moitié du Tchad est désert. Mois je suis Sahélien, ma mère est nomade, donc le désert et moi nous avons un lien extraordinaire. On ne peut pas faire un film sur le Tchad en l'absence du désert qui est un décor magnifique.

* La réalité du Tchad est-elle montrée telle qu'elle est ou est-ce le Tchad du réalisateur ?

Y. D. :
La fiction, selon Haroun, c'est aussi la réalité de ce qui se passe dans le pays. Par exemple "Darrat" est un film sur la vengeance, un acte qui relève de la noblesse dans notre culture. Mais Haroun a voulu inviter à briser le cercle infernal de cet acte et le remplacer par le pardon, d'autant plus que quelque part la nature se vengera de ceux qui le méritent comme dans "Un Homme qui crie".

* Dans les deux films d'Haroun il y a en toile de fond la guerre. La guerre est-elle omniprésente dans le quotidien des Tchadiens ?

Y. D. :
Oui, elle est très présente. Cela fait cinquante ans que nous sommes en guerre. Tous les régimes qui viennent au pouvoir ne viennent que par les armes. Nous vivons tout le temps ce traumatisme. La guerre fait parler d'elle. Lors du tournage de "Darrat", les confrontations avec les rebelles ont atteint la capitale et nous avons dû arrêter le tournage jusqu'à leur repli de N'djamena. On s'était dit "on ne va pas se laisser influencer par la barbarie des hommes en armes". Notre objectif est de faire des films et si nous attendons que la guerre finisse, le Tchad ne connaîtra pas de cinéma. Je tiens à rappeler que nous faisons du cinéma, alors qu'il n'existe pas de salle de projection au Tchad. Tout a été détruit. Mais heureusement, après "Darrat", les autorités se sont mobilisées et nous assisterons très bientôt à l'inauguration des deux meilleures salles de cinéma dans l'Afrique Centrale.




* Le dialogue est très peu présent dans le cinéma de Haroun. Comment arrivez-vous à maîtriser votre jeu, avec très peu de paroles ?

Y. D. :
Je n'ai pas fait d'école de cinéma. J'avoue que je n'ai pas fais de grandes études non plus, puisque je vivais au Nord où la guerre faisait interrompre mes cours à tout moment. Mais la vie est la meilleure école. J'ai commencé quand j'étais enfant, lorsque je regardais les films et faisais des critiques dans ma tête me disant "si j'étais à la place de cet acteur, j'aurais fais ceci au lieu de cela…" Aujourd'hui, je considère que la concentration est mon point fort. Je suis toujours très concentré sur le personnage que je joue. Je dois avouer aussi que je suis instinctif et peux décider parfois en quelques fractions de secondes tout le plan d'interprétation dans ma tête.

* Haroun ne vous dirige pas alors ?

Y. D. :
Non, ce n'est pas ca. Il me donne le fil conducteur comme tout metteur en scène et me dit que tel plan se déroulera comme ça, mais je donne toujours de moi-même et de ce que je ressens en fin de compte.

* Vous avez dans vos films un visage humain mais sévère, rôles de méchant oblige… Accepteriez-vous de jouer dans des films d'amour ou de faire des scènes, disons, "osées" ?

Y. D. :
Je n'ai pas encore eu ce genre de proposition. Le bon et le méchant font partie du métier. Moi, je n'ai pas de tabou. La créativité artistique ne doit pas se plier aux tabous, même si ca risque de faire du bruit.

* Qui était votre modèle en cinéma ?
Y. D. :
Nous ne voyons à l'époque que des Westerns et des films Indiens. Moi, j'ai été fasciné par Amitabh Bachchan depuis toujours.

* Après le succès des deux films avec Haroun n'avez-vous pas reçu de proposition du cinéma européen ?
Y. D. :
"Un Homme qui crie" a été très bien reçu a Cannes et mon nom était parmi ceux qu'on pouvait imaginer remporter le prix de meilleur acteur, mais de toutes les manières je n'ai pas été nommé … Cependant j'ai reçu le prix de meilleur acteur à Angoulême et à Chicago.
Pour répondre à votre question, oui, je viens d'avoir deux propositions belges.

* Quel est le film qui vous a plu dans cette édition du DIFF ?
Y. D :
Le film égyptien "678" qui traitait la question du harcèlement sexuel dans les moyens de transport public. Étant père d'une fille, je suis très sensible à ce sujet qui est d'ailleurs universel.

Propos recueillis par
Hala El Maoui

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