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Essaha (La Place) de Dahmane OUZID
Des jeunes en quête d'avenir
critique
rédigé par Sid-Lamine Salouka
publié le 01/03/2011

Le dernier film de l'Algérien Dahmane Ouzid est une comédie musicale au thème actuel mais qui, par certains aspects, n'a pas la légèreté du genre.

Le film s'ouvre sur des jeunes écrasés par une prise de vue en plongée, symbole de leur isolement. À l'heure de la mondialisation, cette génération a pour repères "Tonton Google et Tata Yahoo" et en sait plus sur les Aztèques que sur leurs propres ancêtres. Les occupations principales de Moha, Boualem, Yacine et autres consistent à traîner sur une place publique, à vouer un culte au dieu foot et à se livrer à de petites combines qui ne mènent pas bien loin. Mais est-ce de leur faute ? Tout semble verrouillé pour cette génération et la rupture avec les aînés semble totale : ceux-ci ont l'autoritarisme de l'âge, la force doctrinaire de l'islam et le pouvoir économique.

Chômage, pauvreté et absence de perspectives confinent ces jeunes sur la place, seul espace où un semblant de vie est encore possible.
Une des scènes du film montre plusieurs couples qui se succèdent sur un banc ; on sent que les filles veulent aller plus loin qu'un simple dialogue perpétuellement ressassé, tandis que les garçons n'ont qu'un futur hypothétique à offrir. La place devient ainsi le personnage principal du film, d'autant que l'histoire n'est pas construite autour d'une figure centrale auquel le spectateur pourrait s'identifier.

Les innombrables difficultés de la jeunesse sont passées en revue au travers du rêve de Yacine qui veut produire une comédie musicale. En mêlant la musique traditionnelle arabe à d'autres genres comme le rap, les jeunes arrivent dans leurs messages à subvertir la société par une dérision cinglante de l'immobilisme des anciens, de l'abrutissement d'une vision religieuse étriquée et de l'enferment de la femme, devenu impossible à une époque où tout fout le camp.
Mais si la montagne de difficultés qu'affronte la jeunesse algérienne est bien présente, c'est son traitement en une sorte de patchwork qui semble être la faiblesse du film. On a l'impression que le scénario en fait trop et que ce traitement de thèmes aussi variés conviendrait davantage à une série télé. Certaines réponses, d'autre part, relèvent de la pirouette, la prise de conscience de Kawazaki (surnom du personnage le plus intéressant du film) et de ses camarades parvenant à faire reculer un entrepreneur et à sauver la place. Le lien est fait : il faut rester, lutter, assainir son cadre et ouvrir une voie vers la démocratie et la liberté de parole de tous ceux et celles qui sont bâillonnés et non pas fuir.
L'actualité de la Révolution de Jasmin dont les ondes secouent le monde arabe, nous empêche de crier que la ficelle est trop grosse…

Certaines comédies musicales sont conçues à partir d'une intrigue faible mettant davantage en lumière les artistes de la chanson qui en étaient les vedettes. Chez Dahmane Ouzid, si la musique et les chorégraphies sont belles, l'intrigue, elle, est surchargée, voire brouillonne.

Sid-Lamine SALOUKA
Burkina Faso

Paru le Dimanche 27 février 2011, Bulletin Africiné n°12 - Ouagadougou (Burkina Faso), FESPACO 2011 - n°1, pp. 1 et 3.

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