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Anja Breien : "Le plus important est de voir des films"
Entretien de la réalisatrice norvégienne avec Marina Niava, Oslo
critique
rédigé par Marina Niava
publié le 20/10/2012
Anja Breien, réalisatrice
Anja Breien, réalisatrice
Anja Breien et Marina Niava.
Anja Breien et Marina Niava.
Anja Breien
Anja Breien
Anja Breien, à la Berlinale 2011
Anja Breien, à la Berlinale 2011
Ansikter/Visages
Ansikter/Visages
Ansikter/Visages, 1970
Ansikter/Visages, 1970
Voldtekt (Le Viol), d'Anja Breien, 1971
Voldtekt (Le Viol), d'Anja Breien, 1971
Hustruer (Wives), d'Anja Breien, 1975
Hustruer (Wives), d'Anja Breien, 1975
Hustruer III (Wives III), d'Anja Breien, 1996
Hustruer III (Wives III), d'Anja Breien, 1996
Sans titre (Uten tittel), d'Anja Breien, 2005, avec Samantha Gurah
Sans titre (Uten tittel), d'Anja Breien, 2005, avec Samantha Gurah
La Norvégienne Tanni Samantha Gurah, actrice principale du film Sans titre (Uten tittel), d'Anja Breien
La Norvégienne Tanni Samantha Gurah, actrice principale du film Sans titre (Uten tittel), d'Anja Breien
Fonds de coproduction de films du Sud
Fonds de coproduction de films du Sud
Films du Sud, édition 2012
Films du Sud, édition 2012
Films du Sud
Films du Sud
Films du Sud, édition 2011
Films du Sud, édition 2011
Anja Breien
Anja Breien

Anja Breien est l'une des pionnières du cinéma en Norvège. Elle est la première femme cinéaste de ce pays. Née le 12 juillet 1940, elle cumule plus de 35 ans de pratique du cinéma avec - chose peu commune - une majorité de court-métrages dans sa filmographie. Son long-métrage Arven sorti en 1979 est l'un des seuls films norvégiens à accéder à la compétition officielle du festival de Cannes. Sympathique et parlant couramment le français, Anja Breien a accordé cette interview à Oslo, à Marina Niava, réalisatrice, journaliste et membre de l'Association des Jeunes Techniciens de la Télévision et du Cinéma de Côte d'Ivoire (AJTEC-CI).

Anja Breien, vous êtes une doyenne du cinéma en Norvège. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez commencé ?

AB : J'ai commencé un peu par hasard. J'ai rencontré un jour un réalisateur qui m'a demandé ce que je voudrais faire après l'école. J'ai dit peut-être du cinéma. Il a dit "Ah ! C'est bien". Et deux semaines après, une scripte me téléphone et me propose de la remplacer sur un tournage qu'elle doit quitter parce qu'elle a été embauchée à la télévision. "Je vais vous apprendre" m'a-t-elle dit. J'ai donc commencé comme script-girl. Mais j'ai vite compris que si je voulais faire du cinéma je devais trouver une école de cinéma et il n'y en avait pas en Scandinavie.

C'est ce qui vous a poussé à aller en France ?

AB :
Oui j'ai étudié le français et avec mon prêt étudiant, je suis allée à l'IDHEC (actuel FEMIS) pendant deux ans (de 1962 à 1964).

C'est très intéressant le fait d'avoir choisi de vous former. Pourquoi ne pas avoir simplement appris sur le tas ?

AB :
J'avais le sentiment qu'il fallait apprendre, que c'était nécessaire. Pourtant, à cette époque en France c'était la Nouvelle vague (mouvement du cinéma français de la fin des années 50, ndlr). Vous savez, les figures emblématiques de la Nouvelle vague n'avaient pas bénéficié d'école de cinéma. Ils allaient à la Cinémathèque [Paris], ils regardaient des films et connaissaient le cinéma. Pour moi, c'est une excellente façon d'apprendre. Il faut connaître les classiques. Je déplore d'ailleurs que l'école de cinéma en Norvège n'apprenne pas vraiment aux étudiants à connaître l'histoire du cinéma.

Qu'est-ce que l'expérience française vous a apporté ?

AB :
A l'époque, beaucoup de nationalités se rencontraient à l'école de cinéma. Des Indiens, des Sud américains, des Scandinaves etc., et évidemment des Français. C'était une source d'inspiration. Et quand les nouveaux films sortaient, on allait au cinéma au lieu d'aller à l'école, par exemple pour voir le dernier Godard (rires).

Parlez-nous de votre premier film.

AB :
Ansikter ("Visages", en français). C'est un court-métrage, presque sans dialogues. Il évoque une petite fille qui a survécu à la peste. Ce n'était pas très commercial, mais c'était une bonne manière de débuter. Nous l'avons tourné en 1967, mais il n'est pas sorti avant 1971.

Beaucoup de réalisateurs considèrent le court-métrage comme une manière de débuter dans le cinéma, mais vous avez continué à faire des court-métrages même après 30 ans de carrière. Pourquoi ?

AB :
Parce que je pense que ce n'est pas seulement une façon de débuter. C'est comme en littérature. On ne peut pas dire à un nouvelliste qu'il n'est pas écrivain parce qu'il n'écrit que des nouvelles. Le court-métrage a une valeur artistique en soi.

En tant que femme, avez-vous rencontré des difficultés particulières dans ce métier ?

AB :
Je ne crois pas avoir rencontré d'autres difficultés que celles que ma génération en général a dû affronter. D‘ailleurs aujourd'hui, la Ministre de la culture en parlait récemment, on veut davantage de femmes dans le cinéma norvégien. Ici il est plus difficile de continuer à faire des films que de débuter. Il y a beaucoup de jeunes ici qui font un ou deux films et qui arrêtent.

Pour quelle raison ?

AB :
Avant, il y avait une institution chargée du cinéma qui s'appelait le Norsk film. Elle avait une équipe permanente, ce qui permettait d'avoir une vision à long terme. Mais maintenant, au sein de l'Institut du film, les consultants ont un mandat de 4 ans. Les responsables changent trop fréquemment. En outre, je pense que les autorités culturelles attendent une espèce de messie, de génie jaillissant de la forêt qui va rafler de grands prix tout d'un coup, un nouveau Ingmar Bergman [grand réalisateur Suédois, 1918-2007, 8 nominations aux Oscars ndlr]. On oublie que Bergman a fait 9 long-métrages, avant d'avoir autant de succès.
Beaucoup de jeunes en Norvège veulent faire des choses en rapport avec le cinéma et les médias. C'est peut-être difficile de les aider quand ils sont si nombreux. Je pense qu'en cela vous avez beaucoup de chance en Côte d'Ivoire parce que dès que vous ferez de bons films, ils susciteront aussitôt un grand intérêt.

Parlez nous du cinéma norvégien. Est-il beaucoup influencé par Hollywood ou a-t-il une identité propre ?

A.B. :
Les styles sont divers. Il y en a dont le rêve est Hollywood et certains y arrivent mais il y en a qui ont une identité plus singulière. Joachim Trier par exemple a tourné un film qui est sorti en France et qui s'appelle "Oslo le 31 août", inspiré d'un roman des années 30 intitulé "Le feu follet". Le film de Joachim Trier sort maintenant aux Etats-Unis et rencontre un succès appréciable.


"Oslo, 31 août" un film de Joachim Trier par Zoomin_France

Avez-vous déjà vu des films africains ?

A.B. :
Oui, il y a un très bon festival ici qui s'appelle Film Fra Sør (Films du Sud) qui regroupent des films d'Afrique, de l'Amérique du Sud et certains pays d'Asie. D'ailleurs un fonds de coproduction a été mis en place pour les long-métrages de ces pays là.

Quel conseil pourriez-vous donner à des jeunes qui veulent se lancer dans le cinéma ?

A.B. :
Je leur dirais qu'aujourd'hui il y a de petites caméras pas trop chères avec lesquelles ils peuvent s'exercer. Mais, au-delà, je pense que le plus important est de voir des films. Une bonne initiative pour des pays comme le tien serait de former des groupes, se procurer des classiques, les voir ensemble et discuter, apprendre l'histoire du cinéma.

Marina Niava

Cet entretien est lié à une série de rencontres entreprises en Norvège par Marina Niava dans le cadre de projets de collaboration entre des institutions et cinéastes de ce pays avec l'Association des Jeunes Techniciens de la Télévision et du Cinéma de Côte d'Ivoire (AJTEC-CI). Sur Facebook : Article original d'AJTEC-CI

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