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Mots croisés avec… - Alassane Diago, réalisateur sénégalais : "Ce qui m'a choqué dans ce festival"
JCC 2012
critique
rédigé par
publié le 05/12/2012
Alassane Diago
Alassane Diago
Fatou Kiné Sène (Africiné)
Fatou Kiné Sène (Africiné)

Le réalisateur Alassane Diago semble perdu aux Journées cinématographique de Carthage (Jcc). A la projection de son documentaire La vie n'est pas immobile au cinéma Le Palace, il n'a eu ni l'occasion d'être présenté, ni d'échanger avec le public venu nombreux. Dans cet entretien, il regrette cette cacophonie dans l'organisation des Jcc et parle de son film.

Fatou K. SENE : Votre film est dans la sélection officielle documentaire des Journées cinématographiques de Carthage (Jcc), comment vivez-vous ce festival ?

Alassane DIAGO : Ça va. Je suis très heureux d'être là, avec un nouveau film. J'étais aux Jcc en 2010 avant la révolution. Je reviens cette année avec mon documentaire intitulé La vie n'est pas immobile. C'est tout un honneur d'être là, de découvrir un public très cinéphile qui remplit les salles de cinéma pour découvrir les films africains. Ce qui est très rare chez nous. Cela fait plaisir à un réalisateur.

Vous avez tout de même fustigé le fait que vous n'avez pas eu l'occasion de discuter avec ce public…

Cette année, l'organisation du festival est un peu spéciale. Parce qu'en 2010, c'était bien tenu. On présentait les réalisateurs avant les films et à la fin, c'était le débat. Cette année, ils n'introduisent pas le réalisateur, on ne sait même pas de quel pays vient le film et à la fin, il n'y a pas de débat. Cela par contre m'a beaucoup choqué pour cette session. C'est très mal organisé. On nous dit qu'il y a des échanges le lendemain de la diffusion de ton film, mais tu ne sais même pas où cela se passe ? A quelle heure ? On n'est averti de rien. C'est un peu bizarre.

Votre documentaire présenté n'est-il pas une continuité du premier fait sur votre mère ?

Oui c'est le prolongement de mon premier film Les Larmes de l'émigration. Dans ce dernier, à la fin, je parlais déjà d'un combat. C'est-à-dire que la génération de ma sœur que je dérivais dans le film Les Larmes de l'émigration, le message qui lui était destiné, était "fait tout pour que ta vie soit meilleure que celle de ta mère". Et comment le faire, c'est par une lutte acharnée, il faut qu'elles s'émancipent et mènent leur combat.
Cette lutte, je la montre dans ce film qui dresse le portrait d'une femme Ouley Ba qui préside l'association féminine du village. Elle porte un message du village, celle de la femme et un projet pour l'avenir de celle-ci.

Ces femmes de Lidoubé, dans la région de Matam, luttent pour une reconnaissance de leurs droits…

Il y a une vraie sensibilisation à faire pour ces populations ancrées dans leurs croyances qui n'arrivent pas à avoir la parole et mener à bien leur combat. Elles ne savent pas ce qu'est la parité qui s'arrête à Dakar. Dans la politique, elle existe. Mais dans les villages où les traditions restent toutes fortes, elle n'y est pas appliqué.



Ces femmes revendiquent-elles l'égalité entre hommes et femmes ?

Elles ne parlent même pas d'égalité. Parce qu'Ouley Ba dans le film dit que la femme ne peut pas être égale à l'homme. Elles ne revendiquent pas du tout cette égalité. Ce qu'elles souhaitent, c'est d'avoir la même chance que les hommes, de porter leur projet et de pouvoir le réaliser pour le bonheur de la famille. D'habitude, tous les projets de ces villages sont gérés par les hommes.

Qu'est-ce qui vous rend si proche des femmes que vous filmez à chaque fois ?

Je crois qu'il y a plusieurs facteurs qui l'expliquent. Je suis élevé par une femme. Je n'ai pas grandi à côté de mon père qui est parti à l'émigration ; c'était l'objet de mon premier film. J'ai été bercé par une femme combattante qui, avec l'absence de mon père, a su me donner une éducation qui m'a permis d'être là aujourd'hui.
L'autre chose, je me dis qu'on est dans un millénaire où c'est une urgence en quelque sorte que l'homme et la femme communiquent pour dessiner un avenir commun. Pour moi, l'avenir n'est pas envisageable sans une union des hommes et des femmes.

Alassane Diago peut-il filmer en dehors de son entourage ? (Ces deux films sont l'un Les Larmes de l'émigration sur sa mère, l'autre sur les habitants de son village : Ndlr)

Oui ! Des projets sont en cours. Je crois que je vais marquer une pause pour faire autre chose. J'ai un projet de film qui se passera en France, avec des portraits des premiers émigrés de 1970 Sénégalais. C'est l'envie de démystifier l'Europe. Voir comment ils vivent sur inversion de l'émigration. L'autre fera découvrir cette émigration qu'on ne connaît pas beaucoup entre pays africains. C'est aller à la rencontre de ces émigrés qui ne sont plus rentrés au pays.

Pourquoi tant de sujets sur l'émigration ?

Je suis un fils d'émigré et je viens d'une communauté où toutes les forces vives sont parties. Le sujet est une problématique qui affecte le monde dans toutes les sociétés.

Propos recueillis à Tunis
par Fatou K. SENE

http://www.walf-groupe.com/art-a-culture/44-films/8742-mots-croises-avec-alassane-djago-realisateur-senegalais-lce-qui-ma-choque-dans-ce-festivalr.html

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