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Interview avec Narcisse Wandji, Président et promoteur du festival international des films de femmes.
"La mémoire collective n'évoque pas assez les œuvres de femmes"
critique
rédigé par Martial Ebenezer Nguéa
publié le 18/04/2013

Du 27 au 31 mars dernier, s'est tenue la quatrième édition du festival international de films de femmes, Mis me Binga. Pour vous quelle a été la véritable coloration que vous vouliez pour cette édition ?

Le festival Mis Me Binga 2013 a été un forum sur le thème de la libération et lutte de la Femme au Cameroun. L'idée était de visiter l'histoire du Cameroun avec les femmes. La lutte de l'indépendance a commencé avec les femmes commerçantes qui ont marché sur la place du gouvernement à Douala. C'est juste après les nationalistes comme Um Nyobe qui ont continué le combat. 50 ans après, lorsqu'on retourne dans l'histoire du Cameroun, et que l'on parle de la victoire pour l'indépendance, dans la mémoire collective on n'évoque pas assez ces femmes.
Nous avons voulu interroger le rôle qu'elles ont joué dans cette lutte de libération du Cameroun ; et également voir si cette victoire est partagée.
Avec le concours du Cinéma Numérique Ambulant (CNA), nous avons organisé des projections de films dans les quartiers de Yaoundé. Cette année, nous avons aussi expérimenté la décentralisation vers d'autres villes du Cameroun notamment Douala, et à Garoua dans le Septentrion.

Mis me Binga est un jeune festival qui se construit au fil des éditions. Disposez-vous d'assez de moyens pour assurer sa phase de décentralisation que vous avez entrepris au cours de cette édition ?

Notre objectif, c'est d'aller à la conquête du public, faire connaître davantage le festival, surtout inculquer la culture du cinéma au sein du public. L'autre intention, c'est que le festival puisse porter un caractère véritablement national. Les rubriques que nous ajoutons à notre programmation vont dans ce sens. Par exemple, nous avons mis sur pied - outre la décentralisation - le Binga Talent, concours de films documentaire porté sur la thématique de Droit de la femme au Cameroun. A l'issu de ce concours, la lauréate reçoit une bourse de formation d'un mois à la Femis (Fondation Européenne pour les métiers de l'image et du son) en France. La bourse offerte par le service de la coopération et d'action culturelle de l'Ambassade de France au Cameroun. Les autres lauréats reçoivent des prix de l'institut Goethe et bien d'autres partenaires. Ce sont des éléments qui permettent aux participantes de parler de leur quotidien et d'avoir un encrage conséquent sur l'éducation des masses.

Le festival est un rendez-vous annuel. Alors même qu'au Cameroun, il est clair que financer les projets culturels n'est pas évident. Comment procédez-vous ?

Nous procédons par des méthodes classiques de financement notamment ; en soumettant des dossiers de subvention au ministère camerounais des Arts et de la Culture, et aussi nous répondant aux appels à projets diffusés par des organismes en charge de la promotion de la culture et l'éducation. Malheureusement, très souvent nous enregistrons des avis défavorables. Par contre, nous avons bénéficié d'un soutien de l'ordre de 5.000 euros que nous a alloués Movies That Matter, un organisme néerlandais. Il faut souligner nos fonds propres liés à nos activités annexes dans le cadre de notre groupe d'Initiative commune (GIC) et de nos projets personnels. C'est tout cela qui contribue à financer le festival Mis Me Binga. Nous comptons aussi d'autres soutiens provenant de la coopération multilatérale avec l'Institut Goethe, le service de la coopération et d'action culturelle de l'Ambassade de France au Cameroun, la coopération espagnole et d'autres partenaires.

Parmi les activités en marge du festival, il a été organisé un atelier sur le thème : Comment distribuer un film ? Concrètement de quoi a-t-il été question pour l'organisation ?

C'est une expérience que nous avons souhaité avoir avec des professionnels et surtout ceux qui ont réussi à faire distribuer leurs films. L'idée a été de suivre l'expérience d'une experte, Katrin Lemme, productrice et enseignante qui vient d'Allemagne et travaille dans le secteur de la distribution.
L'idée de cet atelier vient du fait qu'en général dans le cinéma africain, nous faisons des films et puis, il devient difficile de les distribuer. Cette situation ne concerne pas uniquement les professionnels. Actuellement au Cameroun, il existe des instituts de Beaux Arts et autres écoles, universités de cinéma malheureusement qui ne se préoccupent pas de la distribution même dans les enseignements. L'accent est davantage mis sur le processus de fabrication que la suite à donner à une œuvre, notamment sa distribution. En réalité, on ne pense pas véritablement donner une vie à un film après sa sortie. Le cinéma est une industrie. Il faut être capable de vendre un film pour prétendre à un retour sur un investissement. En plus, cet atelier intervient au moment où nous n'avons plus de salles de cinéma au Cameroun. Cela dit, il faut multiplier les stratégies pour vendre un film ou trouver des palliatifs pour pouvoir le distribuer.

En quatre ans, peut-on dire que l'étoffe de vos partenaires s'est élargie ?

Nous essayons de nouer des partenariats avec des festivals. Sur le plan local, nous avons une plate-forme d'échanges avec les festivals tels la Nuit du court métrage, le Festival Yaoundé-Tout Court, Ecrans noirs, le Festival international de films mixtes de Ngaoundéré. Parallèlement, nous avons intégré le réseau des vingt festivals de films de femmes dans le monde grâce au soutien du festival de films de femmes de Dormund en Allemagne et le festival de Cordoba en Espagne. En fait, ce sont ces ensembles de formes de coopération qui nous facilitent aussi le succès du festival.

Propos recueillis par Martial E. Nguea

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