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Conversations - Dans les couloirs du Red Sea IFF
Comme des écrans qui nous parlent
critique
rédigé par Bassirou Niang
publié le 19/03/2023
Kaouther BEN HANIA, réalisatrice et scénariste tunisienne
Kaouther BEN HANIA, réalisatrice et scénariste tunisienne
Bassirou NIANG, Rédacteur (Dakar) à AFRICINÉ MAGAZINE, correspondant spécial au Red Sea FilmFest
Bassirou NIANG, Rédacteur (Dakar) à AFRICINÉ MAGAZINE, correspondant spécial au Red Sea FilmFest
Oliver STONE, réalisateur et scénariste américain
Oliver STONE, réalisateur et scénariste américain
Shekhar Kapur, réalisateur indien
Shekhar Kapur, réalisateur indien
Film d'ouverture du RSIFF 2022, Djeddah
Film d'ouverture du RSIFF 2022, Djeddah
Gurinder CHADHA, réalisatrice britannique-indienne (née au Kenya).
Gurinder CHADHA, réalisatrice britannique-indienne (née au Kenya).
Jemima KHAN, scénariste britannique
Jemima KHAN, scénariste britannique
Sharon STONE, actrice américaine
Sharon STONE, actrice américaine
Guy Ritchie, réalisateur anglais (Red Sea Honoree Award 2022)
Guy Ritchie, réalisateur anglais (Red Sea Honoree Award 2022)

Le Festival de la Mer Rouge qui a débuté le 1er décembre 2022 à Djeddah a reçu aussi bien des hôtes de marque que des images filmiques à la qualité scénique intéressante. Il y a eu aussi d'importants rendez-vous qui ont attiré les attentions dans un monde du Septième Art en plein bouillonnement. Parmi les légendes qui sont accueillies, on peut citer Oliver Stone, le Président du Jury de la compétition officielle qui a honoré une rencontre avec le public professionnel de festivaliers, dans la Section IN CONVERSATION. Ou encore Gurinder Chadha, Guy Ritchie, Shekhar Kapur, Jemina Khan, Kaouther Ben Hania. En voici une tentative de résumé !

Dans ses échanges, le réalisateur américain Oliver Stone a eu un regard neuf sur cette partie du monde incomprise. Il est l'auteur de Platoon (1986), Wall Street (1987), JFK (1991), Nixon (1995), W. (2008), Snowden (2016) et Scarface (1983), pour ne citer que ceux-là.
Pour lui, c'est l'occasion de vraiment plonger dans "le très fascinant cinéma asiatique et africain", convaincu qu'il y a un nouveau monde qui apprend "à utiliser le film" pour "raconter ses histoires". Il s'exprimait ainsi à l'occasion de la cérémonie d'ouverture du Red Sea Festival, à Djeddah, le 1er décembre 2022. Invitant du coup l'Amérique à poser d'abord sur elle-même un regard critique "avant de critiquer les autres".

Shekhar Kapur (Inde), réalisateur du film d'ouverture du Festival, What's Love Got to do with it? n'est pas sensiblement éloigné de ce propos, car pour lui, "malgré toutes les politiques, cette région devient de plus en plus importante". "Nous avons besoin d'un festival important qui vient de cette région ; quelque chose qui puisse sortir et rivaliser avec les grands festivals de films occidentaux". Le réalisateur indien croyant fermement que les ressources mobilisables par cette région pourraient contribuer à en faire "un évènement important". Ce besoin d'autres récits se fait sentir aujourd'hui, dit Shekhar Kapur. Il insistera sur cette importance de faire la promotion de "la culture non-occidentale", comme pour donner du répondant à ces "vents" qui viennent "de l'Ouest et de l'Est". Et aussi de servir la cause écologique. Les cinéastes doivent être aux avant-gardes pour ce combat, puisqu'ils sont des privilégiés. "Le privilège amène la responsabilité", affirme-t-il.

Toujours dans les Conversations, surgissent parfois des mots beaucoup plus émotifs, renvoyant à un rapport plus intimiste. Comme le désir - ou la nécessité ? - d'être maître du récit. C'est l'esprit qui entoure les propos de Gurinder Chadha (Angleterre-Inde) laquelle a travaillé comme journaliste à la BBC. Un groupe de presse dans lequel elle avait conscience de perdre le "contrôle du récit". "En tant que journaliste, je devais faire ce qu'on me disait", confie-t-elle. Reconnaissant, au passage, que cette posture lui a donné "les compétences nécessaires" pour un contrôle du récit afin de le rendre "accessible à un public complet". Elle parlera ensuite de ses difficultés rencontrées à concrétiser ses projets, comme son film Blinded by the light, sorti en 2019, et qui a essuyé le refus de la BBC et de Channel 4, autre chaîne de télé britannique. De quoi doper leur détermination - elle et son équipe - pour le réaliser : "Nous nous sommes battus et nous avons fait ce film… Nous sommes montés à 17 millions de dollars avec Warner Brothers".
Première femme anglo-indienne à réaliser un long-métrage avec Bhaji in the Beach (Bhaji à la plage) en 1993, Gurinder Chadha souligne cette vision différente chez les Britanniques sur l'Arabie Saoudite, où tout est orienté vers la famille et les enfants.



Collaboratrice de Shekhar Kapur, Jemima Khan (elle est la scénariste de What's Love Got to do with it?), s'est exprimée lors de la cérémonie d'ouverture. Elle a surfé sur cette formidable transformation intervenue en Arabie Saoudite où, il y a à peine cinq ans, le cinéma y était considéré comme illégal et que les femmes n'avaient pas le droit d'y conduire une voiture. Elle ne manquera pas de promouvoir "le multiculturalisme, la tolérance et l'amour". Et revenant sur le registre de la collaboration, elle croit que c'est quelque chose de conflictuel, mais que la créativité naît justement de ce conflit. "Il y a un scénario et un réalisateur, et chaque acteur interprète de manière différente. Toutes ces interprétations sont ce que le public obtient", en conclut-elle.

Quant à Sharon Stone, actrice remarquée dans Basic Instinct (1992, avec Michael Douglas) et dont la réputation a été hachée à cause de ce film, elle a soutenu que les femmes ne sont pas là uniquement pour servir les hommes, et qu'au contraire, il appartient à ces derniers de remplir ce rôle. Sur le ton de l'épanchement, elle n'a pas manqué de dire ses misères post-Basic Instinct, confiant, amère, que non seulement la garde de son bébé lui a été retirée par un juge convaincu qu'elle faisait des films sexuels, et qu'aussi pendant huit ans elle n'a pas obtenu le moindre emploi. De plus, menace lui a été faite de serrer les cordons de la bourse si elle s'avisait à prononcer le mot "préservatif" au cours de ses activités au sein de la fondation amFAR, tournée vers la recherche sur le sida.

Honoré lors de ce Red Sea International Film Festival 2022 à travers un Prix pour sa contribution au cinéma, Guy Ritchie, le réalisateur de Snatch et de Sherlock Holmes, a sagement appelé à faire face aux critiques parce que, dit-il lors d'une masterclass, toujours dans la Section Conversations, "vous allez être jugés sur des choses sur lesquelles vous ne pensez pas être jugés".

Alors que le festival s'achemine vers sa fin, la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania (L'Homme qui a vendu sa peau, 2020, La Belle et la meute, 2017, Le Challat de Tunis, 2014) s'est elle aussi prêtée au jeu d'échanges avec un public qui en veut. Dans un débat modéré par Antoine Khalife, ce 7 décembre 2022, toujours lors des rencontres Conversations, Mme Ben Hania est beaucoup revenue sur ses premiers pas au cinéma (après avoir raté le rêve de devenir écrivaine) sur ses rapports avec les personnages de ses films documentaires et fictions, sur son attachement intime à l'écriture, sur aussi ses influences, elle qui pense que la réalisation est "une sorte de magie" (voir autre texte sur sa conversation).

Bassirou NIANG
, Correspondant spécial au Red Sea Festival (Djeddah, Arabie saoudite)

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