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TO MY SON. Un drame pour une guérison familiale
RED SEA IFF 2023
critique
rédigé par Bassirou Niang
publié le 11/12/2023
Bassirou NIANG, Rédacteur (Dakar) à AFRICINÉ MAGAZINE
Bassirou NIANG, Rédacteur (Dakar) à AFRICINÉ MAGAZINE
Dhafer L'ABIDINE, réalisateur tunisien (co-scénariste, producteur et acteur principal du film)
Dhafer L'ABIDINE, réalisateur tunisien (co-scénariste, producteur et acteur principal du film)
Le réalisateur tunisien Dhafer L'Abidine et l'acteur saoudien Ibrahim Al-Hasawi, sur le tournage du film "To My Son", à Abha.
Le réalisateur tunisien Dhafer L'Abidine et l'acteur saoudien Ibrahim Al-Hasawi, sur le tournage du film "To My Son", à Abha.
Dhafer L'Abidine (Tunisie).
Dhafer L'Abidine (Tunisie).
Scène du film TO MY SON
Scène du film TO MY SON
Scène du film TO MY SON
Scène du film TO MY SON

Voici l'histoire de deux pères et de deux fils. Le film TO MY SON du réalisateur tunisien Dhafer El-Abidine (produit par l'Arabie saoudite) ressemble fort à la peinture sentimentale d'une famille normale, soumise aux normes de conduite, mais dont l'équilibre reste bouleversée à cause des humeurs rebelles d'un père autoritaire. Le drame de la mort surprise la fera tanguer et n'en fera que ressouder les liens dans leurs fondements sacrés.
Fruit d'une co-production entre l'Arabie Saoudite (MBC Studios) et les Emirats Arabes Unis, cette fiction d'une durée de 112 minutes a été projetée lors de la troisième édition du Red Sea International Film Festival qui s'est tenu à Djeddah du 30 novembre au 09 décembre 2023, dans la catégorie "Spécial Screenings" ("Projections Spéciales", en anglais). Il convient de mentionner que le premier film de L'Abidine, ‘‘Ghodwa'', a été projeté au 43e Festival du film du Caire, où il a remporté le prix Fipresci.

Le réalisateur exprime un regard lourd de peine porté par le personnage de Feisal. Il est un cadre qui a réussi sa vie en travaillant dans une grande entreprise à Londres et qui s'y est aussi marié avec une britannique, Angela. Cette dernière lui donna, dans la douleur, un garçon baptisé Ahmed. Elle sera tuée par un délinquant à la sortie d'un restaurant où son mari, Feisal, l'avait invitée pour y fêter son anniversaire, alors qu'elle était enceinte. Cet épisode en entraînera d'autres synonymes de douleur, de désemparement, de maladie, avec des questionnements intimes chez le personnage principal. C'est au point de l'amener à prendre la décision de retourner définitivement à Abha, en Arabie Saoudite, son pays d'origine. Il décide d'amener son fils à qui il fera découvrir une autre culture ou du moins son autre culture. Mais ce qui semblait être un chemin de guérison et de réconciliation avec soi, prend une tournure des plus désastreuses.



L'arrivée dans la maison familiale sera le moment d'une explosion de frustration chez le père de Feisal qui n'a jamais compris ce fils revenu au bercail après tant d'années à l'étranger et qui avait semblé les abandonner pour ne pas dire oublier. L'effacement affectif du père envers son fils, ses remarques dérangeantes sur ses choix de vie, son diktat envers ses filles dont la demande en mariage du prétendant de l'une d'entre elles a été rejetée sans raison, ont créé un rapport frontal entre les deux (pères).
Cependant, le trait d'union affectif naitra du petit-fils, Ahmed. Ce dernier lequel fait le bonheur de la famille et celui du grand-père en particulier. Une bouée de sauvetage d'apparence, puisque cela n'arrêtera pas les assauts du père jusqu'à ce que l'on découvre, au détour d'une dispute, que Feisal est gravement malade. Effondré sur le tapis, c'est aux urgences qu'il se retrouvera, réveillant aussi du coup toute l'affection cachée et malmenée d'un géniteur aux apparences autoritaires. Ce dernier découvrira, en effet, son propre chagrin devant le spectacle désemparant qu'offre ce lit d'hôpital, avec son lot d'angoisse.

Le réalisateur insiste sur le caractère psychologique d'un chef de famille fragile et aussi sur celui de cet autre père, Feisal, enflé d'amour pour son fils Ahmed à qui il parle par "les mots" d'un journal personnel qui recueille toute sa chaleur émotive. Le tableau des sentiments affectifs vogue ainsi entre ces deux pères vivant sous un même toit, l'un luttant contre une perte probable et l'autre pour assurer le legs de tout son amour… Ce carnet intime que celui-ci tient porte toute la profondeur affective contenue dans cette âme qui souffre de la maladie, mais dont l'investissement sentimental n'est point entamé.

Les plans rendent bien compte des choix, dans des images parfois pleines de silences aux significations très fortes. Pendant que la maladie éloigne de plus en plus son père, le petit Ahmed trouve ses marques sous le regard bienfaiteur d'un grand-père prompt à se réconcilier non seulement avec lui-même mais aussi avec sa progéniture qu'il a tant éprouvée.
Il eut pourtant un semblant d'intermède dans la vie de Feisal ; le temps de l'illusion d'un nouveau départ. L'amour d'une jeune fille ambitieuse en donnait une impression exacte. Mais le destin que lui réserva le réalisateur bifurqua pour se trouver un point de chute des plus sombres.

To My Son, c'est aussi ces décors généreux, immenses d'une Arabie Saoudite aux montagnes attrayants, mais aussi ces espaces qui respirent comme pour se donner à la création artistique, à l'expressivité des intimités individuelles, dans la douleur comme dans la joie. La cérémonie de mariage de la sœur de Feisal, ces matchs de basket-ball avec le jeune frère souffrant de trisomie, les plans panoramiques l'expriment grandement.
Le choix musical s'imbrique assez bien dans les scènes faisant s'adapter à lui joie, peur, sanglots, rire, sourire étouffé, rage contenue et aussi amour dépouillé. Le réalisateur insère aussi la psalmodie d'un verset du Coran sur l'inévitable retour de l'être auprès du Créateur. Le film était sélectionné au 45e Festival international du film du Caire (15-24 novembre 2023).

Bassirou NIANG

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