Abeni est un film coup de poing avec, comme toile de fond, l'amour, la vie sentimentale de Abeni et Akanni. Des images contemporaines, filmées dans les rues de Cotonou, Porto Novo au Bénin et Lagos au Nigeria avec des détours dans de somptueuses villas et des quartiers populeux, donnent au film toute sa beauté, sa trame et sa vie. Antagonisme des classes sociales. La plèbe contre la bourgeoisie. L'amour. La raison d'aimer. Et le triomphe de l'amour.
Histoire banale de tous les jours, le film montre l'amour de Abeni, une jeune fille nigériane de la haute bourgeoisie pour Akanni, un jeune garçon béninois, de la plèbe et de surcroît le fils du gardien de la famille.
Suite à un incident intervenu au cours de l'anniversaire de Abéni qui avait invité Akanni, Chief Bello, le père de la jeune fille, renvoie son gardien. Ce dernier prend la décision de retourner au Bénin accompagné de sa famille.
Dans sa furie et sa hargne de séparer les deux enfants, Chief Bello, décide à son tour d'envoyer Abéni étudier à Jos, une autre région du Nigeria. Car le richissime Chief Bello nourrissait de belles et grandes ambitions pour sa fille.
Seize ans plus tard, Abeni se retrouve à Porto Novo, capitale du Bénin, dans le cadre du Projet Songhaï, afin de terminer ses études agronomiques. Au cours de son séjour à Songhai, Abéni fait la rencontre fortuite de Akanni et n'hésita plus à lui renouveler son amour. Une nouvelle aventure amoureuse naquit et unit de plus belle les deux amoureux. Instant de fortes émotions, le film remonte la pente avec une chaîne d'intrigues dont Chief Bello se révèle être le principal acteur, décidé comme jamais de faire échouer le projet de mariage des deux jeunes.
Le spectateur se retrouve facilement dans le film qui a le mérite de faire monter peu à peu l'émotion. Sur un rythme soutenu du début à la fin, le réalisateur révéle au fil des séquences une problématique complexe. Abeni, à partir d'une banale histoire d'amour, pose la question de la différence des classes sociales.
Abdel Hakim AMZAT est producteur du film (avec Laha film, basé à Cotonou au Bénin). Il a su incarner le personnage de Akanni, au point où il se confond facilement au personnage central du film. C'est un acteur de "fortune", car il n'a jamais joué dans un film ; c'est ici son tout premier essai et dans un projet qu'il a lui-même initié.
La réalisation et le jeu des acteurs ajoute à la valeur au film. Les acteurs sont Béninois et Nigérians : Sola ASEDEKO, qui interprète Abeni, est nigérianne. Le film tourné en langue Yoruba (sous-titré en français pour le public francophone et en anglais pour les anglophones) exclut par contre le grand public béninois et africain ne sachant lire. Le sous titrage en français pêche par des incorrections orthographiques, à certains endroits. Il faut noter que le choix de la langue yoruba est une visée commerciale par rapport au Nigéria où elle semble être la langue populaire. La langue yoruba n'est parlée que dans deux localités du Bénin qui réunissent environ 20% de la population.
Ce film qui parle de l'amour touche naturellement les cœurs, mais Abeni a su gagner en touchant plus la sensibilité du spectateur quand il met en relief la question des mariages forcés entre grandes familles afin de conserver les traits de noblesse. Les questions relatives à la justice à double vitesse, de l'acculturation des jeunes Africains une fois en contact avec les pays du Nord, les différences linguistiques en Afrique ont trouvé leur juste place dans le déroulement de l'intrigue.
Premier film de Laha Film Production, le film se positionne aujourd'hui au Bénin, depuis le 15 Avril 2006, comme une œuvre de bonne facture capable de révéler aux spectateurs des images qui reflètent leur vécu quotidien.
Sessi T. (Bénin)
