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Quand des paysans font échec aux OGM
Sénèkè law kuma, de Idriss Diabaté
critique
rédigé par Fortuné Bationo
publié le 18/12/2006

Le documentaire "Sénèkè law kuma" réalisé par le chercheur Idriss Diabaté a été projeté pour la toute première fois le 24 novembre à l'Institut Goethe devant un beau public. Pendant environ 1h, le film revient dans une veine altermondialiste sur l'échec de l'entrée des OGM au Mali.

Dans une maison au visage de salle de classe, des membres d'association, des planteurs de coton et des experts discutent à Sikasso sur la possibilité d'introduire des organismes génétiquement modifiés (OGM) dans les plantations de coton au Mali. La chevelure des arbres au-dessus du conclave glisse sous le bâtiment l'ombre d'un arbre à palabre. Les débats houleux font rage à l'intérieur entre pour et contre OGM. Les médias relaient les empoignades de ce forum initié par l'Espace citoyen et d'interprétation démocratique. Premier à prendre la parole, un planteur sud-africain salue cette trouvaille et fait savoir à l'auditoire les performances liées à l'emploi des OGM, qui ont fait exploser sa production en lui permettant de récolter des bénéfices plus grands. Une rumeur de proche dévotion semble courir dans la salle, sans affaiblir pour autant le besoin d'entendre d'autres sons de cloche. L'expérience indienne, moins brillante, déballe alors sa note salée de la bouche d'un paysan de ce pays. 172 personnes se sont suicidées suite aux ravages de cette semence sortie des laboratoires de la multinationale Monsanto. L'environnement y a aussi essuyé des déboires au cours de cette période de 2002 à 2005. Les témoignages accablants de paysans d'autres pays défilent à coup d'arguments éthiques, économiques et sociologiques. Plus éclairés sur l'esprit des OGM, les planteurs locaux font partager leurs craintes d'être absorbés dans le tunnel de simples acheteurs de semences pour reproduire le croquis d'une nouvelle dépendance. Posant des préoccupations d'ordre culturel, structurel et de souveraineté alimentaire, les paysans diagnostiquent, point par point, les conséquences de cette intrusion pour finir par la rejeter en bloc. Film pédagogique, "Kuma" agite le drapeau altermondialiste en proposant d'écouter ceux qui ont rarement voix au chapitre : les paysans. Dans ce parti pris visant à démasquer la machine à sous qui cherche à aliéner d'autres victimes, le documentaire célèbre en coin la tradition par des escales métaphoriques. L'apparent temps mort des débats qui laissent les images ouvrir de gros plans sur telle ou telle activité alimentaire transmise de génération en génération, est sans équivoque : le bruit du pilon a aussi des accents de sauvegarde identitaire. Au cours des débats qui ont suivi la projection, le réalisateur du film Idriss Diabaté a souligné : "Les paysans ont énormément de choses à dire. J'ai voulu ramener leurs préoccupations auprès des consommateurs". Il a par la suite souhaité qu'un débat naisse en Côte d'Ivoire et plus généralement en Afrique de l'ouest autour des OGM.

Fortuné Bationo

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