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L'expérience Godard au Mozambique ou le désenchantement
Histoire du cinéma
critique
rédigé par Azzedine Mabrouki
publié le 05/05/2008
Mozambique, journal d'une indépendance (Kuxa Kanema), de Margarida Cardoso, 2004. Film sur l'INAC
Mozambique, journal d'une indépendance (Kuxa Kanema), de Margarida Cardoso, 2004. Film sur l'INAC

Très souvent encore certaines revues spécialisées nourrissent pour le cinéaste suisse Jean-Luc Godard une admiration sans bornes. La chose généralement admise et soulignée à travers des pages et des pages est qu'au sein de la Nouvelle Vague Française dans les années 1960 ses films se sont imposés aisément par rapport au reste de la production. Son style original n'a pourtant pas survécu dans ses dernières productions. Passons.

Notre propos ici est le fiasco total de son expérience au Mozambique en 1978. Le Mozambique a acquis son indépendance du Portugal après une lutte héroïque en 1975. Cinq mois après l'indépendance a été crée un institut cinématographique, l'INAC. En 1978, le Mozambique a nationalisé les compagnies étrangères de production et de distribution. La même année, l'Inac a abrité des débats longs et sérieux de fond sur la stratégie de développement de la production cinématographique et sur le projet de création d'une télévision nationale.

On a fait appel à Jean Rouch d'abord qui a dirigé à l'université de Maputo un atelier de super 8 et livré avec l'aide de ses collaborateurs Philippe Constantini et Jacques d'Arthyus des courts métrages vidéo réalisés avec les stagiaires mozambicains de l'Inac (Institut National de l'Audiovisuel et du Cinéma).

Toujours en 1978, on a ensuite fait venir Godard, lequel a bénéficié pour sa société Sonimage d'un contrat officiel bien payé (on a trop souvent laissé croire que le cinéaste suisse a travaillé bénévolement, comme une ONG, insupportable mensonge !). Son projet : aider le Mozambique dans la création d'une chaîne de télévision nationale. Cela n'a jamais marché. Godard probablement cherchait surtout à expérimenter de nouveaux matériels dans un terrain vierge comme le Mozambique. Il travaillait en cheville avec un fabriquant de caméras (soi disant révolutionnaires) dont la société était basée à Grenoble.

Godard malheureusement n'a jamais achevé son projet vidéo intitulé très pompeusement : Naissance (d'une image) d'une Nation. Godard se voyait déjà dans la peau du grand Griffith ! Le passage de Godard au Mozambique a laissé des vagues. L'Inac, dirigé alors par le cinéaste mozambico-brésilien Ruy Guerra, fut le théâtre de très âpres controverses et critiques. Une grande polémique sur les projets avortés de Godard. Toute cette histoire qui a coûté très cher n'a servi à rien.

Ruy Guerra a réussi après ça à surmonter cette pénible épreuve. L'inac s'est mis au travail et mis en place une chaîne de production en 16 et 35 mm. En 1983, l' Inac comptait déjà 80 employés. Quatre longs métrages fiction et 70 documentaires étaient en boîte. Le souvenir de Godard était effacé.

Azzedine Mabrouki

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