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Ils étaient la France libre
d'Eric Blanchot
critique
rédigé par Olivier Barlet
publié le 04/09/2005

De production régionale (France 3 Alsace), Ils étaient la France libre se concentre sur cette région mais son propos mérite une diffusion nationale ! Il est si rare de voir les "soldats de l'armée d'Afrique" pris comme sujet ! Et ce film le fait de façon très classique mais bien documentée et nette, ne travestissant pas l'Histoire. Le 19 novembre 1942, les unités basées en Tunisie désobéissent à Pétain et basculent dans le camp allié. Nous sommes dans la logique coloniale : ce sont des appelés d'office, pas des engagés. Ils veulent certes libérer "leur" patrie la France du joug allemand mais espèrent aussi gagner l'égalité à leur retour. Le film leur donne la parole, et cette mémoire captée est importante et rare. Il l'alterne avec des images d'archives selon le procédé classique de l'illustration. Il ressort de ces témoignages que l'Arabe ne montait pas en grade au-delà de capitaine.
Après le débarquement en Italie, les Tunisiens s'illustrent en prenant les positions allemandes dans les montagnes malgré les difficultés en janvier et février 1944. Les tirailleurs y perdent un tiers des leurs. Marseille est libérée par les FFI et les goumiers et tirailleurs, qui rencontrent un formidable accueil dans les villes libérées. Ils se laissent pousser les cheveux, sans doute à cause des filles, et le commentaire note que de nombreux tirailleurs sont restés en Alsace où ils se sont mariés. Car lorsqu'il s'agit de pénétrer en Allemagne avec les Américains au Nord, les métropolitains (les FFI mobilisés par Delattre) remplaceront peu à peu les tirailleurs dans l'infanterie française alors que ceux-ci en constituaient plus de la moitié des effectifs. Ceux-ci resteront à combattre dans la poche de Colmar. Le film se penche alors en détails sur un exemple dramatique : la destruction d'une compagnie qui s'était illustrée dans l'encerclement du Honneck, un bastion d'importance stratégique incertaine que les FFI avaient d'abord pris contrairement aux ordres reçus.
Les officiers ignoraient les patronymes des tirailleurs qui servaient sous leurs ordres. L'aventure coloniale se poursuivait ainsi dans l'armée française, tandis que les tirailleurs chantaient : "C'est nous les Africains qui arrivons de loin, venant de nos pays pour sauver la patrie"… N'est-ce pas en multipliant ces témoignages historiques que pourra non seulement se forger une mémoire débarrassée des dénis habituels mais aussi prendre corps aujourd'hui la solidarité vécue sur les champs de bataille ?

Olivier Barlet

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