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Le cinéma marocain et les jeux des passions
Personnages et visions du monde
critique
rédigé par Noureddine Mhakkak
publié le 21/04/2024
Azlarabe ALAOUI LAMHAZRI, cinéaste marocain (en 2016)
Azlarabe ALAOUI LAMHAZRI, cinéaste marocain (en 2016)
La Tunisienne Fatma Nasser, actrice principale du film JALADINE 2022
La Tunisienne Fatma Nasser, actrice principale du film JALADINE 2022
Le Marocain Yassine AHAJJAM, acteur principal du film JALADINE 2022
Le Marocain Yassine AHAJJAM, acteur principal du film JALADINE 2022

1- Le miroir magique

Le cinéma en tant qu'un grand miroir prend le champ de l'imaginaire et le reflète d'une façon très forte et très artistique. Ce qui fait de lui une force symbolique qui dépasse toutes les autres forces symboliques qui peuvent influencer l'opinion publique d'une manière implicite. Car le cinéma possède une forte magie grâce à l'emploi des images. Et qui parle des images veut nous faire plonger dans le monde de la création artistique très riche par ses significations et ses signes. Ce qui pousse Jean-Luc Godard, en tant qu'un grand cinéaste et critique de cinéma - concernant la force de cet art - à proférer ces mots forts mots : "Je ne veux parler que de cinéma, pourquoi parler d'autre chose ? Avec le cinéma on parle de tout, on arrive à tout.".

À partir de cela, on peut que le cinéma à travers les films qui présente nous offre en tant que des spectateurs, des moments très agréables pour se distraire d'une façon très culturelle et surtout pour voire différemment le monde qui nous entoure d'un autre œil, celui de la pensée mêlée par l'imaginaire sublime.

En effet, lLe cinéma d'abord est un langage artistique, un style différent plein de métaphores. Le cinéma, selon ces idées-là, est un champ de rêves. Un paysage où nos rêves peuvent exister comme des vrais nuages qui passent sous un ciel plein de lumières. Et cela ne peut exister que dans un cinéma d'auteur, un cinéma qui mélange le spectacle qui nous attire vers le chemin de la beauté, de la joie, avec des avis qui nous poussent à réfléchir, qui nous obligent même à penser d'une autre façon. Une façon qui peut être simple, mais profonde aussi.

C'est vrai que nous vivons dans une société de consommation selon Jean Baudrillard, mais malgré cela, on veut, ou au moins, on a le droit de rêver, de voir et de consommer un vrai cinéma. Un cinéma qui nous touche en tant que spectateurs qui aiment voir le monde autrement. C'est-à-dire percevoir le monde à travers des métaphores artistiques et pas le voir comme il est. Car le réel dans un son état pur peut tuer l'imaginaire et rend l'art tel une simple copie médiocre. Ainsi le cinéma, selon Jean-Luc Godard, comme la peinture, montre l'invisible et le simple visible.

2 - Le visible et l'invisible

Ainsi, en voyant le film KILIKIS, la cité des hiboux du réalisateur marocain Azlarabe Alaoui Lamharzi. Ce film appartient au genre du cinéma engagé, puisqu'il traite le thème des prisonniers politiques / détenus dans les années de plomb au Maroc. L'histoire du film est très simple mais est très profonde aussi. Elle raconte, à travers la fiction, la vie quotidienne des gens dans une cité lointaine située entre les montagnes du Haut Atlas. Une cité fictive appelée "La cité des hiboux". Ces gens simples de douar qui vivent tout près d'une prison où les gardiens garantissent la surveillance des lieux.



Les personnages de ce film vivent leurs vies, et chacun d'eux pensent à ses propres problèmes, avant que leurs destins se croisent. Le destin du fkih a été relié avec les histoires de ces retenus, puisqu'il a un fils qui était parmi eux. Alors il a essayé de temps à autre de savoir la façon de leur vie à travers l'un des gardiens de la prison "Hmida ", mais en vain.
Le destin de ce gardien lui aussi est relié avec le destin de l'autre fils de ce fkih lui-même qui n'est que "Hassan" car les deux ont tombé amoureux d'une même jeune femme "Wafa" qui était revenue à son village après des études faites à la ville. Cette jeune femme qui a fait tout que les parents laissent leurs enfants rejoindre l'école. Mais tous ses efforts n'ont pas pu changer la mentalité des habitants de ce village. Dans le déroulement des évènements, le fils prisonnier du fkih va mourir, et son père aussi en laissant "Hassan" tout seul. Ce dernier avec "Wafa" et son père Saïd. Un simple soldat qui semble pris par des remords, vont essayer d'aider les prisonniers en essayant de monter leur histoire. L'histoire du film va prendre un autre chemin héroïque dont "Hassan" et sa bien-aimée "Wafa" sont les deux principaux héros.

Ce film marocain a été bien réalisé à travers une vision cinématographique qui appartient au cinéma d'auteur. Le réalisateur marocain Azlarabe Alaoui Lamharzi a réussi de monter l'invisible ("Les prisonniers") à travers le miroir du visible ("Les gardiens") et la maitrise des plans a été bien faite. Les acteurs ont joué leurs rôles d'une façon professionnelle.

Pour conclure, on peut dire que ce film-là, en tant qu'un film cinématographique, sans parler de la vision personnelle du réalisateur, est un bon film. Puisque le réalisateur a pu, selon l'expression de Jean-Luc Godard "confronter des idées vagues avec des images claires".

3 - Le sacré et le profane

Le cinéma possède une façon magique de faire passer les messages d'une façon symbolique très implicite, puisqu'il peut à travers les jeux multiples des images nous monter la relation du sacré et du profane dans la vie quotidienne, selon l'expression sociologique durkheimienne.

Dans ce cas-là, on peut parler d'un très fort film du réalisateur marocain Hassan Benjelloun, il s'agit de Jalaldine (Jalal Eddine / Jalal eedine / جلال الدين) (2022).
Le film nous présente le parcours très distingué d'un grand homme qui s'appelle Jalaldine. Un homme qui aime tellement sa femme, malgré la grave maladie de cette dernière. Et qui fait tout ce qu'il peut pour ne pas tomber amoureux d'une autre femme d'une façon ou d'une autre. Il essaie de rester fidèle à cette femme malade et éveiller sur elle coute que coute. Cela nous montre le coté sacré de ce personnage.



Un jour, il quitte sa maison sous le poids de son désir naturel, pour se distraire un peu dans une maison de joie, en laissant sa femme endormie. Quand il revient, il l'a trouvée entre la vie et la mort. Et cela nous montre le côté soi-disant profane dans le sens simple du terme, ce qui nous fait penser à la faiblesse humaine devant les passions et les envies naturelles des tous les gens.

Ainsi, et après la mort de sa femme, Jalaldine s'éloigne de sa maison en cherchant la paix intérieure et en essayant de trouver sa propre lumière, celle de la tolérance, de la fraternité humaine. Ce qui mène vers la voie mystique, celle des grands soufis musulmans.

Après vingt ans, Jalaldine est devenu un maître soufi qui vit avec ses disciples en pleine tranquillité et avec une grande compréhension des caractères humaines. C'est vrai que son passé le suit et surtout le passé lié avec les moments de joie qui a vécus avant, mais il est devenu plus fort que ce passé-là, par sa vision humaine très tolérante et très compréhensive, car il a trouvé le sens de la vie humaine et la paix intérieure.

C'est vrai, que ce film à travers son thème majeur qui se base sur le fait de la compréhension humaine de la vraie, c'est-à-dire la vie intérieure des gens. Mais dans ce cas, il faut que les actions des personnages présentés à travers des acteurs qui maitrisent leur métier, tels les deux rôles principaux acteurs du film, Yassine Ahajjam et Fatma Nacer. Car il faut déterminer ici, selon l'avis de Gilles Deleuze, "les domaines de base la petite et la grande formes d'action manifestent à la fois leur distinction réelle et toutes leurs transformations possibles".

Et pourtant, dans le film aussi, on voit la description d'un autre itinéraire, celui du fils de Jalal Eddine lui-même et sa relation avec sa femme. Cet itinéraire qui se coïncide avec celui de son père à travers la présence de cette femme dans la vie des deux hommes, le père et le fils. Et à travers cette relation on voit une description de la beauté corporelle d'une part et la description de la beauté spirituelle d'une autre part puisque la beauté n'est enfin que "le reflet de la passion" selon l'écrivain Nicole Avril dans son livre Dictionnaire de la passion amoureuse.

4 - Le pouvoir des images

On sait qu'"une image vaut mille mots" selon l'expression du grand philosophe chinois Confucius, et cela nous montre que le cinéma en possédant la possibilité de jouer avec les images et de les faire bouger même, a pu dominer le champ de la pensée humaine d'une façon presque totale. Car le cinéma est devenu le miroir magique des temps modernes. C'est pour ces raisons que nous voulons que le cinéma en général et le cinéma africain en particulier nous fassent rêver d'une part. D'autre part, nous voulons en plus penser à notre avenir en tant que des êtres humains préférant vivre dans un monde humain ou même très humain où règne la paix avec toutes ses forces positives.

par Noureddine Mhakkak (1)

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NOTES :
(1) - Noureddine Mhakkak (Chercheur universitaire - Université Ibn Tofail, Kénitra, Maroc).
(2) - Mes remerciements à Dr Sanae Ghouati (Professeur de l'Enseignement Supérieur - Université Ibn Tofail, Kénitra, Maroc) pour ses profondes remarques, à propos de cet article.
(3) - Gilles Deleuze, "L'image-Mouvement". Les Editions de Minuit. Paris 1983, p. 253.
(4) - Nicole Avril, "Dictionnaire de la passion amoureuse". Edition Plan. Paris 2006, p. 48.

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